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  DERNIÈRES AMOURS. 133



XLVIII.


La garnison d’ennuis, qu’Amour rait demeurer
En mon cœur pour S8 garde, est si grande et si forte,
Qu’il ne Caut avoir peur qw’un seul soupir en sorte,
Ne qu’il puisse en ses maux seulement respirer.

Si quelque heureux plaisir se veut avanturer
D’approcher de moq cœur, afin qu’il le conforte,
II esprouve à son ’dam qu’il se faut retirer ;
Car s’il veut passer outre, on le tuë à la porte.

Le desespoir sangl~nt, capi~ne inhumain,
Sans’ jamais se lasser, tient leS clefs en la main,
Et ne tait rien entrer que du party contraire.

Tous pensers gracieux il en" a sçeu bannir,
Mes esprits seulement D’oseroient s’y tenir,
S’ils n’estoient aftIigez et combles de miseres l •


XLIX.


Apeine un dou~ printans commençoit li pous~r
te Jloil, a. !! lieu de tlenrs, au bas de mon visage,
Quand, ainsi qu’un soleil sans Duë et sans ombra8’~,
Vosue œil vint sa lumiere Amon ame élancer.

. Ses rayons gracieux, luisans sans m’offenser,
Eschauiferent un tans doucement mon courage :
liais, comme il- poursuivit plus avant son voyage,
De mille feux ardens je me sentl pressE.-r.

Alors vint mon esté, qui, las 1 encore dure,
Dont le chaud fit mourir mon espoir en verdure,
Sans que je puisse voir un seul de ses fruits meurs ;

Et croy que de tout point il eust seehé mon ame,
N’estoit qu’incessamment je tempere sa tlame
Des yens de mes soupirs et des eaux de mes pleurs..