Page:Desportes - Premières œuvres (éd. 1600) I - Diane. Premières Amours.djvu/13

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En cet Age dernier, ('hassé de sa maison,
Se voit dedans l'enclos d'une estroite prison,
Et reduit sous le joug de pointes figurées,
Souffre contre son gré ses bornes mesurées
Par des jeunes f'spl'ils, dont le faible cerveau
Veut produire à la cour un langage nouveau,
Qui plaist aux ignorans, et nostre langue infecte
De rymes et de mots pris en leur dialecte.
Et comme ces pourtraits de long-tans commencez ,
D'un pinceau delicat craintivement poussez,
Qui ne sont relevez que par la patience,
1I008troot en leur douceur plus d'art que de science
'~urs vers ont par travail plus de subtilitl:
Que de force requise à l'immortalité,
Semblables aux muguets plus soigneux du visage
Que des effets d'honneur qui partent du courage.
Car, comme ces beaux fils, remplis de vanité,
Recherchent le parfum premier que la santé,
Ces ignorans, fardez de paroles déjointes,
Premier que leur sujet vont rechercher les pointes;
Si bien que les premiers sont trop pres du berceau,
Les derniers en naissant ont trouvé leur tombeau.

Desportes, tout remply de lumiere et de gloire,
Qui de l'éternité limite sa memoire,
Ny trop pres de la fin IlY du commencement,
Seul quand et la fureur a eu le jugement.
Car, pour estre tousjours à lui-nlesme semblable,
JI empesche qu'aucun ne luy soit comparable,
Et sans monter trop haut ny trop bas devaler,
Fait qu'estant tout égal on ne peut l'égaller.