Page:Desportes - Premières œuvres (éd. 1600) I - Diane. Premières Amours.djvu/40

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  DIANE,  



XXXIX.


Doucques sera-t-il \Tay que l'~nnuy qui me ronge,
A l'enl"! de ma foy vil'e etern~llement,
Et que mon feu cruel s'embrase mesmement
Dans la mer des pensers mi mon ame se plonge?

Ile payra-t'on toujours d'une vaine.lnensonge~
Bastiray-je tousjours sans aucun fondement?
Seray-je tousjours ,·u, pour aimer ardamment,
Discourir à part moy comme un homme qui songe?

Ne sentiray-je plus au dedans de mon coeur
Qu'un debat obstiné d'esperance et de peur,
Qui, chacune à son tour, s'entre-donnellt la chasse?

lIelasl je croy que non; car que puis-je esperer,
~i je voy ton secours de moy se retirer,
Estans mes ennemis les Inaistres de la plaçe!


XL.


lJuis-je pas ft bon droit Ine nommer miserable,
Et maudire l'aspect sous lequel je fus né,
Atant d'ennuis divers me voyant condamné,
Sans que j'attende rien qui nle soit fa"orabit'?

Si je suis travaillé d'un mal insupporlahlt',
Sans relâche il me presse et me suit obstiné;
Et si quelque plaisir (peu souvent) m'est donm;,
JI avorle en naissant et n'est jamais durable.

J'estimois que le 8Ort, qui m'est si rigoureux,
Las.de sa cruauté, me voulust rendre beureux
Par l'objet tant aimé de IDa seule deesse;

Mais ce trait de bon heur comme un songe ('st pHSé,
Appren!lnt à mon eoetlr, en tenebres laissé,
Qu'apres un peu de joye on sent_mieux la tristesse.