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Page:Desportes - Premières œuvres (éd. 1600) I - Diane. Premières Amours.djvu/91

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  LIVRE I. 37


C’est pitié que d’ouïr les estranges merveilles,
Les miracles divers, les douleurs nompareilles
Et les cris de ses foux trauaillez sans repos:
L’un dit que l’esprit seul a gaigné sa pensée,
L’autre accuse des yeux, l’autre a l'ame insensée
Pour des cheveux trop beaux ou de trop doux propos.

L’un sera captivé par une larme feinte,
Et à l’autre un beau teint donne mortelle atteinte;
L’un transira de froid, l’autre mourra de chaud;
L’un compare aux rochers celle qui le tourmente,
L’autre fait de sa dame une lune inconstante;
L’un se plaint d’aimer bas, l’autre d’aimer trop haut.

Ainsi, dans les enfers, les ombres criminelles
Se plt’Îllnt’nt ,..infmftlt df! leurs peines cruelles
El df’S tounnens diwrs qu’il leur faut supporter i
lIai$, las! je ttO! qu’Amour plus d~ tounnens aSS8lRble
Dans uu coenr amourt.mx, qu’on n’en voit tout enseJ’Y)hle
Aux plus creux des enfers les esprits tourmenter.

Je n’auray jamais fait, si je veux pntreprendre
De ce bourreau cruel les rigueurs faire entendre,
Rigueurs qui chacun jour se 10nt a8sez sentir:
Il est assez connu, sa ragf~ est manifeste,
ilais, helas! c’est le pis qu’un chacun le detelte,
Et ne peut ou Ile veut de luy se garantir.

Or de lnoy qui le puis, et qui me delibere
D’estre frane pour jamais d’une telle misere,
Je pren congé d’Amour et de ses feux euisans :
Adieu, Amour, adieu, enfant plein de malice,
Adieu l’Oysiveté, ta mere et ta nourrice,
Adieu tous ces escrits où j’ay perdu mes ans.