Page:Desprez - L’Évolution naturaliste, 1884.djvu/76

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orne le cabinet de l’auteur des Frères Zemganno. Le père des romanciers, un des héros obscurs de l’épopée impériale, mourut « à quarante-quatre ans des suites de ses fatigues et de ses blessures, de sept coups de sabre sur la tête, d*une action d’éclat en Italie, de la campagne de Russie faite tout du long avec l’épaule droite cassée le lendemain de la Moskova. [1] » La famille avait une propriété à Breuvannes dans le Bassigny. Ces horizons d’enfance ont laissé leur trace dans l’œuvre des deux frères. Renée Maupérin agonise à l’ancienne abbaye de Morimond, et l’enfance de Germinie Lacertcux a pour cadre les environs de Langres. Un souvenir de Breuvannes, ce nom de Lacerteux. 11 appartenait à une bonne vieille que M. Edmond de Goncourt se plaisait à agacer, tout enfant. Quelque quarante ans plus tard, ce nom le frappa par son air misérable, tourmenté, hystérique. Dans Elisa encore reviennent quelques mots des patois du Bassigny ; après tant d’années, l’auteur revoit « les vives couleurs » des filles de « la plantureuse Haute-Marne. »

Jules fut l’enfant gâté de la jeune veuve, qui s’occupait non seulement de son éducation, mais de son instruction et se condamnait au rôle de répétitrice. M. RMmond de Goncourt a gardé un portrait de son frère enfant, un pastel, qui le représente « en frac de garde-française, partant pour un bal costumé, le re| avivé par la poudre, le lampion sur l’oreille, la main sur la garde de l’épée, crâne et rebondi à dix ans comme un amour de Fragonard 2 . »

Ce fut en 1848, à la mort de leur mère,’ que com-

  1. Histoire d'Henriette Maréchal. 1.Philippe Burty. Maitres et petits Maîtres..