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Page:Desrosiers - Âmes et paysages, 1922.djvu/14

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Dans la maison Fécite enveloppait tout le monde de sa tendresse comme d’un chaud manteau. Elle maintenait les liens de la famille dispersée, invitant les fils et les filles, donnant des nouvelles, pleurant sur les lettres, aux arrivées et aux départs. Que de fois elle attirait mes oncles dans un coin pour recommander l’observance des pratiques religieuses ou suggérer des attentions délicates pour leurs parents. Elle donnait gravement aux jeunes mères des conseils de patience, ravie d’entendre leurs longues et secrètes confidences sur les tracas et les soucis domestiques.

Elle était peu à peu devenue l’âme de la maison, une espèce d’ange qui amollissait les cœurs afin d’y faire germer l’affection, l’amour, la douceur. Elle développait notre sensibilité, lui créait des besoins, rendait notre vie intense en faisant de nous des hommes qui veulent sentir autour d’eux le parfum des amitiés terrestres, pratiquer le commerce de l’intimité et de l’attachement. Et c’est pourquoi nous avons tous en nous comme un gouffre de pardon, de pitié et d’attendrissement où l’on peut éternellement puiser. Nos larmes sont plus prêtes et les choses nous touchent plus profondément.