Page:Desrosiers - Âmes et paysages, 1922.djvu/144

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

mette à sa place Jean Dorion : Voilà l’ultimatum dépouillé de toutes ses formules. Dans l’esprit du premier ministre s’élève alors le tourbillon des pensées, des hypothèses, des probabilités et des calculs. La vigoureuse intelligence, placée tout à coup en face d’un fait aussi extraordinaire, le happe, le triture, l’examine avec une vitesse vertigineuse, pèse le pour et le contre, trouve les causes et les conséquences et suppute les bonnes ou mauvaises chances. Et c’est pourquoi Pierre Langelier reste là, un instant, absorbé. Puis il congédie son interlocuteur qui a bien rempli sa mission.

Si l’Association des Industriels jette sur l’autre plateau de la balance ses sacs d’écus et son influence, le premier ministre n’ignore pas la probabilité d’une défaite. À qui s’adresser pour faire reconsidérer cette décision ? « Association », vaste corps anonyme sur lequel son éloquence ne peut avoir de prise, qu’on ne peut convaincre par la véhémence de l’argumentation, qui est partout et se dérobe à l’étreinte. Il envoie un télégramme au président : le président vient de partir pour un long voyage en Europe. Il veut atteindre d’autres chefs : c’est l’été et tous