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Prosper et Graziella



Prosper avait été élevé par une mère méticuleuse qui avait le sentiment et le goût des convenances. Aussi, à vingt ans, son éducation terminée, était-il parfait, irréprochable et correct sous tous les rapports. Il portait des habits brossés, dont les plis horizontaux et verticaux se distinguaient bien, des cols et une lingerie d’une blancheur immaculée, des souliers vernis. Un géomètre n’aurait rien trouvé à reprendre à la rectitude de la raie qui séparait ses cheveux lissés jusqu’à l’humiliation la plus complète du moindre poil rebelle. Petit et court, mais bien proportionné, il jouissait encore d’un visage souriant et gai où se reflétaient un optimisme puéril, une appréciation honorable de soi-même et la satisfaction intime qui en est une conséquence nécessaire.

C’est au ministère où il travaillait qu’il était beau de voir à l’œuvre notre incomparable Prosper. Le corps très droit, les pieds formant un angle aigu, la tête légèrement penchée en avant, il composait ses lettres avec une gravité et un sang-froid d’ambassadeur boutonné jusqu’au col, et alignait des chiffres avec une attention convenable et soutenue. Ses cahiers, reflets de leur maître, avec leur