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vait à la rigueur, n’en rien dire dans le discours du trône. On empêchait par là la Chambre de se prononcer dès le commencement de la session sur cette question, et on se donnait toujours un peu de vie. La marche des évènements pouvait amener de nouvelles complications et peut-être rendre la majorité moins hostile à la décision métropolitaine. On se décida donc à annoncer simplement à la Chambre que la dépêche du ministre des colonies lui serait soumise. La Chambre ne pouvait rien répondre d’hostile à cette information et la question fut ainsi ajournée.

Des hommes politiques un peu forts, un peu amis de leur réputation, un peu disposés à faire face aux difficultés, un peu moins attachés à leur charge n’eussent certainement pas eu recours à ce misérable moyen d’éluder une question de cette importance !

Plus tard dans la session, un membre de l’administration déclara que les ministres exécuteraient la loi, et que leur devoir ne leur laissait pas d’autre alternative !! À trois reprises différentes, la Chambre s’était prononcée, à d’immenses majorités, contre Ottawa : cette ville était précisément la seule localité dans le pays dont personne ne voulait ; les vœux du pays sur cette importante question, méritaient bien quelque considération, autant au moins que la bévue de M. Labouchère ; les Chambres en invoquant l’intervention de la métropole, sous-entendaient nécessairement que sa décision serait au moins acceptable au pays : or le devoir des ministres était-il de dire : « Nous n’avons pas d’autre devoir à accomplir que celui d’exécuter une décision que l’opinion publique déclare absurde. » Si on avait choisi Trois-Rivières ou Sherbrooke, aurait-on accepté cela sans mot dire ? Au fond l’absurdité n’eut été que très peu plus grossière !! Est-ce donc que les Ministres n’avaient plus de devoirs envers le pays, du moment que le ministre des colonies avait parlé ? N’est-il pas clair, évident qu’en parlant ainsi, ces Messieurs bouleversaient complètement toutes les notions de devoir et de droit ?

Mais on faisait une insulte à la Reine, en ne maintenant pas sa décision.