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Page:Dessaulles - Lettres de Fadette, cinquième série, 1922.djvu/114

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se mourait… et je n’ai plus rien entendu que le battement de mon cœur qui vivait, lui !

Le silence fut quelque chose de grand, d’infiniment triste dans cette blancheur impalpable qu’aucune étoile n’éclairait, qu’aucune ligne ne traversait, et je pus me croire toute seule dans un grand monde fini.

Malgré le froid et la vague angoisse, je restai là, attendant une lueur, la lueur que nous ne renonçons jamais à attendre ! Mais rien ne vint ! Le brouillard épaissi pénétrait comme de la pluie : je rentrai transie, toutes mes pensées étouffées par ces vapeurs glacées et je bénis le sommeil qui me ferait oublier la profonde tristesse de la nuit.

Tous, dans notre vie morale, nous avons été perdus dans des brouillards semblables, ou disparaissait la trace même des indicateurs et des soutiens ordinaires. Les lumières du ciel étaient éteintes, les choses familières devenues étrangères, et nous restions solitaires, glacés, silencieux, ne voyant plus notre but, incapables de décider quelle route prendre !

Mais derrière les brouillards de la terre, il y a toujours le grand soleil qui finit par pénétrer, et le vent survenant roule les masses blanches pour les dissiper dans l’espace. Et derrière les brouillards de l’âme, il y a toujours la Vérité, une, immuable et parfaitement claire, pourvu que notre conscience reste droite et veuille fermement s’affranchir des pensées troublantes et vagues que