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Page:Dessaulles - Lettres de Fadette, cinquième série, 1922.djvu/125

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de leurs discussions ont éveillé en eux une animosité proche de l’antipathie ; ce qui enthousiasmait l’un laissait l’autre froid et parfois l’ennuyait. Ils se quittaient tristes et inquiets et ils se retrouvaient avec un peu d’appréhension.

Ils ont chassé ces ombres sans en chercher la cause, en se disant : nous nous aimons, tout s’arrangera plus tard ! — Plus tard, quand l’enchantement de l’amour tout neuf fut passé, les ombres revinrent, demeurèrent, et firent de leur vie une désolation semblable à celle de la campagne sous le ciel gris de novembre.

Comment pourrait-on faire comprendre que l’amour n’est pas durable s’il n’est qu’une griserie et un sentiment irraisonné : il doit être une attirance de sympathie, l’intuition et l’entente l’un de l’autre, la connaissance des qualités et des défauts, et l’assurance intime et profonde qu’ils sont les défauts et les qualités qui peuvent vivre avec les nôtres sans provoquer la guerre au foyer.

Il y a trop de malheureux êtres liés irrévocablement qui arrivent à la conviction lamentable qu’ils n’ont ensemble de commun que leur maison et leur nom. Tout est cause de friction entre eux, tout engendre la lutte : dès qu’ils sont ensemble ils perdent leur entrain et ils n’ont plus rien à se dire : la faute n’est pas celle de l’un plus que celle de l’autre : ils n’étaient pas faits pour vivre en-