Page:Dessaulles - Lettres de Fadette, cinquième série, 1922.djvu/13

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s’identifie avec sa race, sa famille, son état, sa dignité, plus, infiniment plus que ne le fait une femme. De celle-ci on ne connaît presque rien si l’on sait seulement où elle est née, quelle éducation l’a formée, quelles aspirations elle a reçues de son milieu, de quels intérêts elle a rempli sa vie. C’est là presque tout l’homme, et c’est absolument le tout de bien des hommes, mais je le répète, au risque d’exagérer un peu, ce n’est presque rien de la femme ! Il y a chez toutes un être très intime, très mystérieux, tout à fait différent de ces autres êtres qui s’ajoutent à elle, auxquels elle s’adapte, et qui en reste toujours distinct.

Connaître cet être infiniment caché d’une femme, c’est l’avoir observée avec autant d’intelligence que d’amour, car elle se tient en garde contre toutes les incompréhensions et contre toutes les indifférences. Elle a la pudeur de ses émotions et de ses sentiments profonds, et même à ceux qui croient la bien connaître, elle réserve d’étonnantes surprises. Celle que l’on croit toutes simples sont quelquefois bien compliquées, et celles qui nous paraissent des merveilles de bon sens sont souvent aussi déraisonnables que leurs sœurs moins sages.

Moi qui suis une femme je sais tout cela, et cependant j’eus, hier encore, une de ces révélations qui renversent toutes les idées préconçues que l’on se forme sur les personnes que l’on croit bien connaître.