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Page:Dessaulles - Lettres de Fadette, première série, 1914.djvu/18

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Tant et tant qu’il a fallu que notre âme devienne plus grande et plus profonde pour les conserver tous, plus intelligente et meilleure pour continuer à aimer la vie ! Dans la souffrance elle a appris la pitié ; elle a compris que la mort est quelquefois douce et bienfaisante, et les glas de novembre ne lui apportent pas seulement les lamentations des pauvres âmes, mais leur espoir et leur triomphe.

Car si les cloches pleurent sur la terre, c’est en saluant le ciel, et au glas lugubre succède le carillon qui chante les espoirs réalisés, la foi couronnée, les tendresses assouvies, les vérités éclatantes, l’affranchissement des âmes, le bonheur enfin, l’impossible bonheur de la terre.


V

Dans le brouillard


Le brouillard, d’abord léger comme un tulle fin, s’est épaissi peu à peu : il est maintenant tendu comme un grand voile, qui, à dix pas, ferme notre horizon. On avance en se demandant si, parmi les ombres que l’on entrevoit, indistinctes quoique si près, ne se trouve pas notre meilleur ami à qui nous apparaissons aussi comme un fantôme, et on est pénétrée d’une impression de tristesse.

Notre âme a, comme la nature, ses heures de brouillard : qui ne les a pas connues ?