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Page:Dessaulles - Lettres de Fadette, quatrième série, 1918.djvu/104

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indiscrets et des curiosités vulgaires. Et toujours les tristes se sont relevés plus vaillants d’avoir au moins confié leur douloureux secret, eux qui ont tant pleuré en dedans, avec des larmes qui retombaient sur leur cœur.

Je me demande parfois si parmi les suppliants dont les prières sont restées inexaucées, il en est beaucoup qui, dans la suite, ont pu comprendre que le refus avait été un bienfait, et que l’énergique Miséricorde qui scrute les profondeurs des cœurs et des vies sait mieux que nous ce qu’il nous faut.

Il arrive à chacun de nous d’être un jour à un tournant de la vie, où l’on voit à la fois ce qui est passé et ce qui nous attend, et nous pouvons, avec sincérité et reconnaissance, dire avec le poète : « Ô Dieu, Tu m’as sauvé du péril de mes trop nombreux désirs ! » Si j’aime les églises désertes, c’est qu’on y sent plus distinctement flotter le meilleur des âmes humaines : ce qu’il y a de plus vrai, de plus profond, de plus aimant dans les cœurs humains s’est livré ici sans défiance et sans restriction… et ceux qui ont perdu la foi comme ceux qui en vivent, ont pleuré dans les églises silencieuses qui les enveloppaient de leur douceur. C’est bon de venir y déposer nos agitations, et de nous donner le temps d’y regarder la couleur de nos âmes. Quand elles sont grises comme le temps et molles comme la pluie, elles ont grand besoin des leçons de vie et de mort que donne l’église par toutes ses lumières et toutes ses ombres.