Page:Dessaulles - Lettres de Fadette, quatrième série, 1918.djvu/110

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quelques-uns, et c’est dans le terrain de la famille qu’ils sont enterrés… c’est grand… il peut en tenir gros ! achève-t-il gravement

Pauvre petite grand’mère ! Morte en pleine jeunesse et qui se disait en se sentant mourir : tout est fini !

Mais rien n’était fini, et ses enfants l’ont continuée, et des enfants de ses enfants naîtront d’autres enfants encore…

C’est la chaîne, la longue chaîne humaine, qui, dans chaque famille, s’étend entre le ciel et la terre, et dont chacun de nous est l’un des anneaux ; et dans ce cimetière, il me semblait qu’elle était visible, et que la jeune femme, au ciel, la regardait s’allonger, et qu’elle souriait d’être l’aïeule de tant de petits-enfants.

De l’autre côté du grand voile de mystère, elle ne s’étonne plus de ce qui nous trouble. Elle comprend pourquoi les mères sont enlevées aux petits enfants, et pourquoi la mort vient chercher les bébés dans les berceaux pour les coucher dans les tombes. Elle voit que ce douloureux mystère n’est pas cruel et elle ne se demande pas comme nous pourquoi Dieu donne aux mères des enfants qu’Il leur reprend si vite. Elle poursuit sa vie du côté des grandes lumières, et elle attend dans la joie que la destinée des siens s’accomplisse. L’imagination humaine peut-elle concevoir cette paix et cette félicité planant au-dessus de la souffrance humaine qui gémit et se lamente inlassablement sur la terre ?