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Page:Dessaulles - Lettres de Fadette, quatrième série, 1918.djvu/34

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petits tableaux. Tout au fond de l’église un peu sombre, se détache l’autel, où la clarté des cierges minces pique des étoiles roses ; à droite le rideau fermé cache le mystère de la crèche rustique et attire les curiosités chaque année renouvelées, malgré le décor toujours semblable.

Et voilà que l’église se remplit ; les bonnes sœurs, lentes et graves, précèdent les petites filles, qui, deux à deux, se prosternent en cadence au signal de la tapette de bois : les femmes tout emmitouflées, les enfants aux yeux gonflés de sommeil, les cavaliers et leurs blondes et enfin, tout juste avant l’entrée solennelle des enfants de chœur, les hommes, après avoir mis leurs chevaux à l’abri, apportent un parfum de fauve dans leurs gros capots de fourrures couverts de neige qui fond à la tiédeur de l’église, et dont la vapeur se mêle à la fumée bleue de l’encens. Derrière ses yeux fermés, passe et repasse le curé, affairé et hospitalier, et à la tribune, l’organiste essaie en sourdine les cantiques que chanteront à tue-tête, tout à l’heure, les petits garçons de l’école.

… Les dernières vibrations des cloches expirent dans l’espace, et le grand silence qui suit fait ouvrir les yeux de la petite rêveuse. Elle se sent très lasse comme si elle avait parcouru une longue, longue route, et elle se laisse glisser sur ses oreillers dans un demi-sommeil, où elle perçoit vaguement des pas furtifs et des chuchotements… peut-être les préparatifs du réveillon ?