Page:Dessaulles - Lettres de Fadette, troisième série, 1916.djvu/139

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Le train roule toujours dans la nuit commençante : je ne distingue plus rien dehors, mais en moi je sens vivre tant de pensées bonnes et fortes entendues souvent sans que mon esprit distrait ne les ait remarquées : elles ont, quand même, en silence, habité mon âme, elles y ont creusé un profond et mystérieux chemin, et m’ont conduite à la conviction, que si l’on peut ignorer la vérité, on n’a pas le droit de la rejeter ou de l’oublier après l’avoir « vue » et comprise.


LII

La politesse des Canadiens

S’il suffisait de faire un joli tapage pour affirmer une vérité, il aurait été incontestablement prouvé, hier, à ce thé intime, que les Canadiens ont perdu cette fine fleur de politesse qui croissait ici il y a cinquante ans.

Oui, messieurs, on vous traita avec sévérité, mais il ne tient qu’à vous de prouver qu’on fut injuste.

Une bonne petite âme essaya de vous défendre : une clameur couvrit sa voix indulgente : toutes parlaient à la fois, et à travers les exclamations, les éclats de rire, les fusées d’esprit, se firent jour des anecdotes comiques, des exemples illustrés et mimés de manques d’égards, de réponses cavalières, de paresse à se déranger, des messieurs dits bien élevés, que mes amies ont l’occasion de rencontrer sans sortir de la bonne société.