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Page:Dessaulles - Lettres de Fadette, troisième série, 1916.djvu/50

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du champ, et le vent rafraîchi souffle sur leur fatigue avec un bruit d’ailes qui s’agitent.

La douceur du soir nous pénètre. Sans volonté, sans désir, presque sans pensée, nous demeurons à demi-étendus sur les fauteuils de la galerie, à peine conscients des bonsoirs des travailleurs qui saluent poliment notre paresse béate.

Et soudain, le son de la cloche tombe dans le silence et nous tire brusquement de la somnolence où nous glissions. Les glas tintent lugubrement, et nos cœurs se serrent, car nous pensons au pauvre petit soldat tué en Belgique et dont le service sera chanté demain… et à la mère qui se désole tout près… et à toutes les mères d’Europe et d’Amérique qui tremblent et qui pleurent !

Oui, pendant que nous nous laissons être heureux ici, la guerre continue furieuse là-bas. Les hommes se tuent, les blessés agonisent dans les hôpitaux, tout comme l’automne dernier et plus encore !

Mais notre sympathie ne s’exprime plus qu’en exclamations apitoyées ! Oh ! je le sais, vous allez protester et me dire : « Nous avons travaillé tout l’hiver, nous avons donné et même beaucoup, et nous ne sommes pas égoïstes… » En êtes-vous bien sûres ? et notre élan n’est-il pas bien arrêté ? Cependant, le besoin dure, le malheur augmente et logiquement, les secours doivent continuer et même se multiplier.

Il faudra beaucoup de lainages et de tricots cet automne, et c’est maintenant qu’il