Page:Dessaulles - Lettres de Fadette, troisième série, 1916.djvu/55

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fixer les causes, ont eu recours à un subterfuge : ils ont bandé les yeux de l’Amour et mis ensuite toutes ses erreurs sur le compte de la cécité !

Contre cette boutade, plusieurs protestèrent, et prétendirent que si la passion est aveugle, la sympathie est clairvoyante et devine généralement juste. Je suis de cette opinion. Et plus les âmes sont délicatement impressionnables, plus leurs intuitions sont rapides et sûres.

Mais où nous étions toutes d’accord, c’est qu’on nous plaît ou qu’on nous déplaît avant d’avoir ouvert la bouche, pour des raisons que nous ne saurions toujours formuler et que nous exprimons par le fameux « parce que » qui fait sourire dédaigneusement les hommes si raisonnables qui ont la prétention de tout expliquer… on sait avec quel succès, parfois !

Nous expliquons moins, c’est vrai, mais nous sentons, nous voyons et nous vivons nos sympathies. Ne semble-t-il pas, en effet, que la sympathie soit comme la vision de l’en-dedans d’une âme pareille à la nôtre ; doucement elle nous tire à elle car elle nous devine aussi.

Cette prescience porte immédiatement les âmes à se chercher dans tout ce qui les révèle, et si elles s’abandonnent à cette curiosité, alors commence un des plus charmants moments de la vie ?

On se connaît à peine mais on se devine. On parle… et chacun fait juste la réponse