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Page:Dessaulles - Six lectures sur l'annexion du Canada aux États-Unis, 1851.djvu/139

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pas d’être homme d’honneur ; tout est bon pourvu qu’on réussisse à pallier l’ineptie de ses amis.

Dans tous les cas, Messieurs, il me semble que si le ministère, au lieu de proposer une réciprocité boiteuse et purement nominale comme également avantageuse aux États-Unis et au Canada ; au lieu de se donner l’air d’être le maître des conditions ; au lieu de donner à entendre que le Canada pouvait facilement se passer des marchés américains ; au lieu surtout de menacer le gouvernement Américain de mesures rétaliatoires, avait adopté la tactique que lui indiquait également le bon sens et les circonstances ; avait paru comprendre la position actuelle du pays ; avait laissé entrevoir l’annexion des Canadas comme une de ces nécessités politiques dont il n’est donné à personne d’empêcher la réalisation : que conséquemment accorder la réciprocité, même telle que demandée, c’était faciliter les transactions entre les deux pays, rendre leurs intérêts plus communs, leur liaison plus étroite ; que c’était en un mot leur faire apprécier plus exactement les avantages qui doivent nécessairement découler pour eux de l’annexion ; que c’était l’amener indirectement et par des voies dont l’Angleterre elle-même ne pouvait pas raisonnablement se plaindre ; et qu’après tout puisque les Canadas étaient inévitablement destinés à tomber dans la confédération américaine, mieux valait pour celle-ci favoriser leur développement industriel puisqu’il était de son intérêt de les admettre riches plutôt que pauvres et arriérés sous tant de rapports, et que cette avance se retrouverait un jour : il me semble dis-je, que si le ministère, ou plutôt le négociateur, se fût placé sur un semblable terrain, il se serait acquis de suite les sympathies des hommes influents aux yeux desquels on s’est rendu ridicule par des prétentions exagérées et insoutenables.

— Mais ce sont là de ces choses qu’on ne dit pas ?

Et pourquoi non, quand on les pense, quand on les sait vraies, justes ? Pourquoi ne pas accepter franchement une éventualité prochaine, un événement certain ?

Y a-t-il de l’habilité à faire semblant d’ignorer ce que tout le monde sait, à ne faire aucune acception d’événements que tout le monde prévoit, que tout le monde sait être inévitables ? Est-ce se montrer bien compétent à gouverner un pays que de