Aller au contenu

Page:Destutt de Tracy - Élémens d’idéologie, première partie.djvu/60

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de bien plus fortes lésions sans que vous vous en aperceviez  : or, cette faculté d’être affecté de plaisir ou de peine à l’occasion de ce qui arrive à nos organes, fait encore partie de ce que nous nommons la pensée ou la faculté de penser. Penser, dans ce cas, c’est donc sentir une sensation, ou tout simplement sentir.

Penser, comme vous voyez, c’est toujours sentir, et ce n’est rien que sentir. Maintenant me demanderez-vous ce que c’est que sentir  ? Je vous répondrai : C’est ce que vous savez, ce que vous éprouvez. Si vous ne l’éprouviez pas, ce serait bien inutilement que je m’efforcerais de vous l’expliquer  : vous ne m’entendriez ni ne me comprendriez. Mais puisque vous avez la conscience de cette manière d’être, vous n’avez besoin d’aucune explication pour la connaître  ; il vous suffit de votre expérience. Sentir est un phénomène de notre existence, c’est notre existence elle-même  : car un être qui ne sent rien peut bien exister pour les autres êtres, s’ils le sentent ; mais il n’existe pas pour lui-même, puisqu’il ne s’en aperçoit pas.

Vous pourriez avec plus de raison me de-