Page:Destutt de Tracy - Quels sont les moyens de fonder la morale chez un peuple ?.djvu/32

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autre que l’habitude à qui n’a encore l’expérience d’aucune passion, ni d’aucun événement.

Indépendamment de ces considérations qui sont particulières à l’enseignement moral des enfans, toutes les réflexions que j’ai faites sur l’éducation des hommes s’appliquent à toutes les autres parties de l’instruction des enfans. Voulez-vous accroître leurs connaissances ? Ce n’est pas seulement une profusion de leçons qu’il faut leur offrir, mais donner à leurs parens la disposition, le moyen et l’intérêt de les en faire profiter. Cela est vrai, sur-tout des classes les moins aisées, c’est-à-dire de celles qui composent les neuf dixièmes de la société. Le moindre dégrèvement d’impôts augmentera plus le nombre des hommes sachant lire et écrire, qu’une légion de maîtres d’école. Un degré de plus d’aisance dans les cultivateurs accroîtra plus les produits de la terre et le bon sens national, que toutes les sociétés d’agriculture et tous les professeurs de logique de l’Europe ne pourraient le faire. Ce n’est pas que je ne sente tout le prix des recherches des compagnies savantes et des travaux des sociétés d’enseignement. J’ai fait ma profession de foi sur ce point, et j’ai dit ci-dessus ce que je crois utile à faire en ce genre. Mais je regarde ces estimables établissemens eux-mêmes comme des conséquences nécessaires du bon ordre social, et comme infructueux sans lui pour créer la morale publique. Quand je compare leur pouvoir à cet égard à celui des institutions politiques, j’y trouve la même proportion qu’entre les forces de l’art et celles de la nature. Celles-là ne peuvent rien contre celles-ci, et ne sauraient les modifier qu’en les faisant servir elles-mêmes à leurs desseins. Je suis sur-tout péné-