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Page:Deulin - Contes d’un buveur de bière, 1868.djvu/212

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Contes d’un buveur de bière

réjouissaient d’assiſter à un si beau supplice.

Le filleul de la Mort parut pieds nus, en chemise & la corde au cou, pendant que la cloche sonnait à toute volée.

Il fut salué par une immense clameur d’imprécations, & monta sur le bûcher qui était aussi haut que le beffroi.

Le bourreau y mit le feu & y jeta la grande faux, pour qu’elle subît le même sort que son maître. Le bûcher brûla trois jours & trois nuits.

Le matin du quatrième jour, sur les cendres fumantes, apparut un homme debout, tenant une faux à la main : c’était le filleul de la Mort ! À cette vue, les Condéens s’enfuirent épouvantés.

Macaber considéra que, s’il eſt vrai que nul n’eſt prophète en son pays, on lui avait fait bien de l’honneur en le prenant pour un sorcier, & il ne voulut point se venger de ses compatriotes.

Seulement, il commanda qu’on saisît le juge prévaricateur, &, pour le punir d’avoir si mal tenu la balance de la Juſtice, il en fit forger une en fer & haute de vingt pieds : il la suspendit au bec du coq qui perche au bout du clocher.

Dans un des bassins il plaça le juge, &, ses crimes dans l’autre. Le premier bassin fut enlevé tout de suite jusqu’au fléau par le poids du second ; & Macaber condamna le magiſtrat abominable