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Contes d’un buveur de bière

las ! pendant qu’il recinait, arrive une vache maladroite qui marche sur la bête & l’écrase.

Jean recommença à geindre de plus belle.

« Faut-il que j’aie de la malchance ! soupirait-il. On m’avait donné une gerbe, un coq l’a mangée ; on m’a donné le coq, & voilà qu’une vache l’écrase !

— Bah ! ne pleure point. Je te donne la vache, dit le seigneur du village, qui passait le fusil sous le bras & la carnassière au dos.

— Merci, monseigneur, » fit le Ninoche tout joyeux, & il voyagea jusqu’au brun soir avec sa vache.

Il demanda l’hospitalité dans une ferme, & on les envoya tous les deux à l’étable.

Le fermier avait pour méquenne, ou, si vous le voulez, pour servante, une grande & belle fille, forte comme une attache de moulin.

« Vache qui vient de loin, dit-il, a de gros pis, » & il commanda à la méquenne d’aller traire celle de Jean du Gogué.

La bête souffrait beaucoup de ses pis. Elle cingla de sa queue le visage de la méquenne, qui en vit plus de dix mille chandelles.

Celle-ci était une fille aussi emportée que vigoureuse. Dans un accès de colère, elle saisit une fourche & éventra l’animal, qui tomba roide mort.