Cette exagération déplut au chat qui, trois jours après, s’étendit tout de son long dans le jardin et contrefit le mort. À sa vue, la femme de Gagliuso s’écria :
— Oh ! mon mari, quel affreux malheur ! le chat est mort.
— Que le diable l’emporte ! répondit Gagliuso ; mieux vaut lui que nous.
— Qu’allons-nous en faire ? reprit-elle.
— Prends-le par une patte et jette-le par la fenêtre.
Le chat, qui était loin de s’attendre à ces bonnes paroles, se mit à dire :
— Est-ce donc là cette grande récompense pour t’avoir ôté les poux du corps ? Est-ce là ce million de grâces pour t’avoir fait jeter tes haillons, si effilochés qu’on pouvait y suspendre des fuseaux ? Est-ce là ta reconnaissance pour la toile d’araignée que j’ai tissée afin de te nourrir, quand tu mourais de faim, mendiant, va-nu-pieds ? As-tu donc oublié que tu n’étais qu’un porte-guenilles, un traîne-misère, sans culotte, dépenaillé, dépouille-pendus ? Voilà ce qu’on gagne à laver la tête à un âne ! Va, maudit soit tout ce que j’ai fait pour toi, car tu ne vaux même pas la peine qu’on te crache à la figure. Elle est jolie, la châsse d’or que tu me préparais ! La belle sépulture que tu allais me donner ! Va donc, sers, travaille, souffle, sue pour ce beau salaire ! Oh ! malheureux qui fonde sa marmite sur la foi d’autrui !