Page:Deulin - Les Contes de ma mère l'Oye avant Perrault.djvu/58

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probablement puisé la matière de plusieurs autres récits.

À côté de cette narration sobre, élégante et qui n’en a pas moins conservé l’accent du conte populaire, la versification de Perrault est bien lourde et embarrassée. Une rapide comparaison entre les deux versions fera mieux ressortir la supériorité du conteur du xive siècle sur celui du xviie.

Et d’abord Perrault ne donne pas, comme Boccace, pour titre à son historiette ce simple mot : Griselidis, qui la résume si bien. Il préfère l’intituler la Marquise de Salusses, ce qui est plus noble, et il ajoute en sous-titre ou la Patience de Griselidis. Il avait même dans sa première édition changé Griselidis en Griselde, et sa principale raison était que le nom de Griselidis lui avait paru « s’être un peu sali dans les mains du peuple. » Ce n’est point d’ailleurs un conte qu’il entend écrire, mais une nouvelle, c’est-à-dire, comme lui-même l’explique dans la préface des contes en vers, « un récit de choses qui peuvent être arrivées et qui n’ont rien qui blesse absolument la vraisemblance. » Il ira même, dans l’Envoi de Griselidis, jusqu’à se faire dire par un interlocuteur bénévole : « Quoique vous lui donniez le titre de nouvelle, votre ouvrage est un véritable poëme. »

C’est cette malheureuse prétention à ériger en poème un simple conte qui a tout gâté ; c’est elle