Page:Dick - Le Roi des étudiants, 1903.djvu/245

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le, dont la lecture venait de se terminer au moment de votre arrivée.

— Madame, répliqua Després d’une voix toujours courtoise, mais ferme, je regrette infiniment de ne pouvoir apposer ma royale griffe au bas de cet acte notarié, car je suis venu, au contraire, pour empêcher ce contrat de se signer.

— Plaît-il, monsieur ? fit madame Privat avec hauteur, car elle commençait à trouver la plaisanterie un peu forte.

— C’est comme j’ai l’honneur de vous le dire, madame.

— Ainsi, vous avez réellement la prétention d’empêcher le mariage de ma fille ?

— J’ai la prétention d’empêcher Joseph Lapierre d’épouser mademoiselle Laure. »

La veuve du colonel eut un ricanement nerveux.

« En vérité, monsieur, vous êtes plaisant pour un roi ! dit-elle.

— J’ai bien peur, madame, que vous ne me trouviez, au contraire, bien lugubre dans quelques instants, » répliqua solennellement Després.

Cette réponse fit tressaillir légèrement la veuve et causa une certaine émotion dans l’assistance. Les fauteuils se rapprochèrent insensiblement et les chuchotements cessèrent, comme si les paroles du jeune étranger eussent été le prologue de quelque drame mystérieux.

Quant à Lapierre, redevenu à peu près maître de lui-même, par un puissant effort de volonté, il se tenait renversé sur son fauteuil, le regard insolent et la lèvre dédaigneuse. Il semblait assister à quelque bonne farce d’écolier, et ne pas se préoccuper le moins du monde de ce qui pouvait en résulter.