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Montré. 3 novembre 1906. g„e dit-elle? continua tranquillement Thom

  • SVn un mot! articula sèchement Gaspard.

.,|,i Elle n’est pas malade, au m0in(S||i’ que non!.. • Ses yeux sont comme des éruption... Gare la lave! ’ mis ça. . . On serait vexe a moins. ijt Tli nas eut un petit rire qui sonnait fa"Xpr.’ quoi, ’I reprit de sa voix la plus tranqUlllp, i’, 11e sait pas encore <|u’ellc est ici sous la sâuregarde du chef de sa famille... Sans cela-- —Sans cela?... Il nous faudrait subir une scène un Vninment dit-on cela sur le plancher des vachesr . . iv„ importe: je devine le mot. _|e ,,:lrie que non: c’est “pathétique” que j’ai dans l’idée. 1 1 hii-là ou un autre: la scenc en question 07 t’.’t 1 < 1 t 1 i : ai je résolu de lui laisser ignorer que ,,, suï. ; hnrd et de ne me laisser voir que s’il jév a’p.a- moyen de faire autrement. . l’tmiiin tu voudras, compère. Je suis de ton avi-, bien que, à vrai dire, je ne vois pas continent il te sera possible de garder longtemps le rôle de capitaine invisible. Qui sait?.... Ne pressons rien. ... Il sera toujours temps... murmura le capitaine, plus perplexe qu’il ne voulait se l’avouer. Puis, avec impatience : —En attendant, n’oublie pas, n’oublie jamais. même pendant l’espace d’une demi-minute, les conditions formelles de notre association:

respect absolu à ma soeur; point de menaces 

ni de promesses trompeuses; aucun piège de t ei imagination diabolique, — où je ramène chez nous la femme du capitaine et je te fais pendre à Saint-Pierre, par-dessus le marché. . . Est-ce compris? —Eh oui ! nom d’un phoque!... Il faudrait t mr ne pas saisir nettement la mora’. ’ discours. —Bon, alors. Pourtant, je veux te répéter une dernière fois : Nous sommes associés pour la contrebande. Mais j. n’ai consenti à t’aider dans l’enlèvement de Suzanne qu’à la condition formelle que tu ne lui parleras qu’avec mon autorisation et ne lui causeras aucune frayeur inutile. J’ai à me venger de son mari, qui trouve que j’ai une nie de négrier; mais je ne veux pas que ma - eur subisse d’inutiles tourments d’esprit. Au reste, ça ne sera pas long. .. En attendant, laisse porter 1111 peu davantage et ne serre pas le vent comme ça. Nous serons toujoui assez en vue, même à plusieurs milles au large. —Ah ! bah ! qui pourrait se douter que c’est nous qui avons fait le coup? Ton fré re, parbleu!... Je veux dire ton cousin le capitaine. —I.a bonne plaisanterie!... Puisque nous lui avons brûlé la politesse le propre jour de ses noces et que la "frousse” nous a fait quitter le pays, sans demander notre reste !... —11 y a du vrai là-dedans, mais... —Eh bien? —Nous n’en avons pas moins décampé 1111 Peu. •. lestement, ce matin-là, sans demander aucune permission.... Tu t’en souviens, ami Gaspard ? Ht Thomas eut ce petit rire sardonique qui avait le don de mettre hors de lui son bilieux associé. Pourtant, cette fois-ci, le trait manqua son l’Ut, car Gaspard répliqua sur le même ton; — Il n’était que temps, nom d’un phoque... Quelle apparition !... J’en ai encore froid entre les deux épaules. —Moi. c’est dans le creux de l’estomac que ces coup, là portent. T’en ai presque mal dîné, S’ 111011 sac à vivre a bonne mémoire. Aussi aile gardé rancune à mon beau-frère de m’avoir, eonitnc ça, coupé l’appétit avec ses allures de Avenant... Toutefois, je me console en songeant au bon tour que nous lui jouons en ce uioment. ,—Savoir... murmura Gaspard, si la nuit qui s econle nous donnera le temps de mettre notre Album Universel (Monde Illustré) No 1175 trésor en lieu sur et de filer ensuite hors de vue. lie quel trésor veux-tu parler?... De celui qui est en jupes ou de celui qui est en iuts? I bornas, toujours pince-sans-rire, faisait allusion au chargement de la goélette et a sa pauvre soeur prisonnière. I u sais bien, répliqua aigrement Gaspard, que je me soucie comme d’une sardine de notre cargaison de contrebande, comparée à Suzanne. —Voilà qui est du dernier galant... Merci pour ma soeur! déclama le capitaine, d’un ton moitié figue, moitié raisin. I’ui,s, reprenant sa voix ordinaire: -.Mais il 11c s’agit pas de ces fariboles sucrées pour le quart d’heure... Nous verra-t-011 passer, ce tantôt?... Hum! je ne réponds de rien : il fera grand jour quand nous aurons la baie par notre travers de bâbord... Mais il y aura tout de mente joliment des milles entre Kécarpoui et notre “Marsouin”... Au petit bonheur, futur beau-frère, et tirons une bonne bordée vers le large : c’est ce qu’il y a de mieux à faire pour le quart-d’heure. Gaspard acquiesça d’un mouvement d’épaules, et, changeant de propos : — Tu as donné aux gens du canot le prix convenu ? —( )ui : un baril d’eau-de-vie. Et il ajouta, après un coup d’oeil jeté du côté de terre : Pourvu que nos gaillards ne s’avisent pas de le mettre en perce avant d’avoir regagné la cote, s’ils ne voient rien de suspect là-bas... —Quelles instructions leur as-tu données? — D’atteindre la côte, sans retard, et de se cacher. eux et leur Canot, dans la première anse venue, du moins tant que le “Vengeur” sera dans leurs parages. -Très bien. Une fois installés dans quelque trou des falaises, qu’ils se soûlent tout à leur aise: ils seront moins enclins à battre les grèves. Thomas, fort occupé à allumer sa pipe, ne répondit pas; et, ayant cédé la roue à son compagnon pour cette importante opération, il négligea de la reprendre, préféiant marcher decidelà sur le pont. Cependant l’horizon rougeoyait tout là-bas. à l’orient. I.e jour allait venir. Où se trouvait-on? Un coup-d’oeil du côté de terre montrait le Gros-Mécatina derrière la poupe du “Marsouin ”. à une quinzaine de milles de distance et à une bonne lieue en aval. O11 pouvait virer de bord, sans crainte des regards indiscrets, et changer d’amures pour mettre le cap sur le Petit-Mécatina, qui était l’étape en vue. Thomas s’approcha du gaillard d’avant et héla à haute voix : —Jean Bec ! Jean Brest !... Debout, mes caplans : il s’en va midi ! Une tête hérissée, bouffie de sommeil, surgit de l’écoutille. C’était celle de Jean Brest. Le porteur de la susdite jeta un coup-d’oeil à l’orient, teinté d’une lueur rouge-pâle, et grommela : —Il s’en va midi!... Je le crois sans peine. .. Il s’en va même demain matin, mais il s’en faut de vingt-quatre bonnes heures. —Debout, tout de même, espèces de lantentins. Nous avons rude besogne à faire aujourd’hui. Jean Brest sauta sur le pont, suivi de son confrère Jean Bec, non moins ébouriffé que lui. Et tous deux se portèrent aussitôt aux écoutes, car Thomas venait de commander : —Pare à virer! Gaspard obéit comme les autres, en manoeuvrant sa roue de façon à amener le vaisseau vent debout. Les voiles battirent un instant. Les anneaux de fer des écoutes glissèrent bruyamment sur leurs tringlé?. Le “Marsouin”, redressé d’aplomb, eut quelques mouvements de tangage, comme un coursieb qui “encense”... Puis, ayant fait son “abattée” sur le flanc droit, il reprit son élan à travers les vagues, ayant cette fois le cap directement sur le “Petit-Mécatina”, que l’on commençait à distinguer nettement dans le nord-ouest, à une dizaine de milles de distance. Il était exactement quatre heures du matin. Si la brise continuait à souffler ferme, on pouvait espérer atteindre l’escale et décharger le plus gros de la cargaison avant qu’il fit jour. En effet, trois heures plus tard, le “Marsouin" avait accompli sa louche besogne et quittait l’ile “Mystérieuse”, allégé d’un poids de quelques milliers de livres et d’un fardeau bien autrement lourd : la femme du capitaine Arthur Labarou, désormais prisonnière de son plus mortel ennemi. Le “Marsouin” gagna directement la côte nord, en face, et se dissimula si adroitement dans l’estuaire de la “Petite-Mécatina”, que la meilleure longue-vue marine l’eut en vain cherché dans les fiords sans nombre qui échancrent le littoral de cette rivière. CHAPITRE XIII OU WAPWI RETROUVE UNE BONNE MERE ET UNE... BELLE-MERE. Le jour ! s’était donc dit le petit sauvage, en s’éveillant au sein de l’obscurité des catacombes du Mécatina. Par une des failles de la caverne qu’il observait, VV apwi voyait bien surgir un rideau de lumière artificielle, émanée de la lampe de la Grande-Ourse. Mais cette nappe de clarté rougeâtre 11e lui en imposait pas : il savait qu’au dehors c’était le soleil lui-même qui illuminait la vaste demisphère du firmament. Ce qui le confirmait encore dans son raisonnement, c’est le silence absolu régnant dans la grotte observée. La Grande-Ourse, comme les fauves à quatre pattes, s’était tue et dormait probablement, une fois les ténèbres du dehors fondues dans l’aube. Wapwi redescendit la faille où il s’était insinué, toucha du pied le talus sableux et tenta de s’orienter. D’abord, il constata que la mer montante avait bouché l’ouverture des grottes et qu’il n’y avait rien à faire de ce côté-la. U lui fallait attendre la mi-marée baissante pour sortir des entrailles du rocher par la même voie qui l’avait introduit. Mais c’était bien long, une attente de quelques heures, à ne rien faire, après un bon somme ! Le petit sauvage tournait donc, fanal en mains, ses yeux attentifs sur les voûtes et les piliers du massif. Il avançait ici, reculait là, tournant à droite, tournant à gauche, virevoltant, sans but précis, lorsqu’il mit le nez dans une faille ascendante qui le mena tout droit dans un coin du magasin des contrebandiers. La fissure partait de là, béant de plus d’un pied, mais obliquement et de façon presque imperceptible. Il y avait, dans cette “salle”, tout un pandémonium de tonnes, de futailles, de bouteilles, entassées dans un certain ordre, mais ayant tout de même un aspect plutôt chaotique... Une idée surgit aussitôt de l’imagination de Wapwi : Soûler la Grande-Ourse et enlever Suzanne! Il avait bien songé, plusieurs fois, à paralyser sa belle-inère d’un bon coup de fusil... Mais la crainte de causer une trop forte émotion à Suzanne l’avait arrêté. Il avait cherché autre chose... Et voilà que le hasard lui faisait trouver un moyen moins aléatoire pour réduire le cerbère de la grotte ! Wapwi choisit donc une bonne bouteille d’eau-de-vie, qu’il prit la peine de déboucher pour en constater la force, et retourna vers son canot. Ayant eu le soin de se munir d’une pelote de fil, il attacha sa bouteille par le goulot et se mit en frais de sortir de la caverne par l’arcade qui l’y avait introduit. Mais, au moment de diriger son canot sous la voûte qui commençait à s’ajourer, le petit Abénald sentit gigoter dans sa cervelle des lambeaux d’idées, qui se condensèrent pour prendre consistance de suite... Il avait remarqué tout à l’heure un certain tonnelet, soigneusement mis à part dans un angle surélevé de la caverne aux liqueurs. Heurté du joint, ce tonnelet n’avait “sonné” ni creux ni plein. 15