Page:Dick - Une horrible aventure, 1875.djvu/63

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― C’est donc en Amérique, le Canada ?

― Palsembleu ! où voulez-vous que cela soit ?

― Hé ! partout ailleurs.

― Malheureusement, poursuivit de Lalande, l’incurie du gouvernement de notre bon monarque et la malsaine influence de la Pompadour nous firent perdre cette immense contrée, qui s’appelait alors Nouvelle-France.

― Vous avez raison, M. de Lalande, répondit Georges en saluant amicalement le jeune homme, et je vous suis infiniment reconnaissant de n’avoir pas oublié mon pauvre cher Canada.

L’étudiant s’inclina, et notre héros, mis à l’aise par les bienveillantes dispositions de son auditoire, crut devoir donner essor à son éloquence étoffée et débiter la tirade suivante :

― Pendant que votre roi faisait bombance avec sa maîtresse, au milieu d’une cour de plats courtisans ; pendant que votre gouvernement, servile valet de madame de Pompadour, daignait à peine écouter les supplications des autorités canadiennes et fermait l’oreille aux échos plaintifs qui lui arrivaient de la Nouvelle-France, que faisaient nos pères ? Ce qu’ils faisaient, messieurs ? Ils combattaient ! La carabine à l’épaule, les raquettes aux pieds, une maigre ration de cheval dans le ventre, vêtus de haillons, leurs pauvres pieds rougis dans les chaussures sabordées, ― mais le cœur toujours avec l’indomptable courage accoutumé, ― ils défendaient pouce à pouce et arrosaient de leur noble sang cet immense pays que la courtisane Pompadour appelait quelques arpents de neige !