Page:Dickens - Barnabé Rudge, tome 2, Hachette, 1911.djvu/106

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

(ici il s’arrêta pour regarder autour de lui, comme pour s’assurer que le gentleman en question n’était pas là)… que le diable en personne. Voilà tout ce que je peux dire. Voyons ! est-ce tout, maître ? Vous n’en finirez donc pas, ce soir ?

— Eh bien ! voilà qui est fini ! dit Gashford, en se levant ; à propos, je voulais encore vous dire… comme cela, vous n’avez pas trouvé que votre ami désapprouvât la petite expédition d’aujourd’hui ? Ha ! ha ! ha ! c’est heureux que cela se rencontre si bien avec la leçon à donner à M. le témoin ; car je suis sûr qu’il n’a pas plus tôt entendu parler de votre projet qu’il a voulu le voir exécuter. Et à présent vous voilà partis, hein ?

— À présent, nous voilà partis, maître. Vous n’avez pas un dernier mot à nous dire ?

— Ah ! ciel ! mon Dieu non, dit Gashford avec une douceur charmante, pas le moindre.

— Bien sûr ? cria Hugh en poussant du coude Dennis, qui riait dans sa barbe.

— Bien sûr, hein, maître Gashford ? » dit le bourreau, toujours riant d’un rire étouffé.

Gashford réfléchit un moment, indécis entre sa prudence et sa méchanceté. Puis, se plaçant entre eux deux, et leur posant à chacun une main sur l’épaule :

« Mes amis, leur dit-il tout bas d’une roix crispée, n’oubliez pas… mais je suis sûr que vous vous en souviendrez… n’oubliez pas notre conversation de l’autre soir… chez vous, Dennis… vous savez sur qui : Pas de merci, pas de quartier, ne laissez pas deux soliveaux de sa maison debout, à la place où les amis le charpentier. Le feu, comme on dit, est un bon serviteur, mais un mauvais maître. Que ce soit son maître ; il n’en mérite pas d’autre. Mais je suis bien sûr que vous serez fermes, je suis bien sûr que vous serez résolus ; je suis bien sûr que vous vous rappellerez qu’il a soif de votre sang et de celui de vos braves compagnons. Si vous avez jamais montré ce que vous savez faire, c’est aujourd’hui que vous allez le faire voir. N’est-ce pas, Dennis ? n’est-ce pas Hugh ? »

Ils le regardèrent tous les deux, et s’entre-regardèrent après ; alors ils se mirent à pousser un grand éclat de rire, brandirent leurs gourdins au-dessus de leurs têtes, lui donnèrent une poignée de main, et sortirent en courant.