Aller au contenu

Page:Dickens - Barnabé Rudge, tome 2, Hachette, 1911.djvu/181

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Je vais essayer d’autre chose, répondit M. Haredale, qui était déjà remonté sur son cheval.

— Je vous assure que je vous plains, et d’autant plus que nous sommes tous les deux dans le même cas. Je ne suis pas sûr d’avoir ce soir une maison à vous offrir : laissez-moi vous l’offrir, au moins, pendant qu’elle est encore debout. Pourtant, en y réfléchissant, ajouta le vieux gentleman en remettant dans sa poche son portefeuille qu’il avait déjà tiré, je ne veux pas vous donner ma carte : car, si on la trouvait sur vous, cela pourrait vous mettre encore dans l’embarras. Je m’appelle Langdale ; je suis marchand de vin distillateur ; je demeure à Holborn-Hill. Si vous venez me voir, vous serez le bienvenu. »

M. Haredale s’inclina et piqua des deux, tout près de la chaise, comme auparavant, pour se rendre chez sir John Fielding, qui passait pour un magistrat actif et résolu ; il était d’ailleurs déterminé, si les émeutiers venaient à l’attaquer, à exécuter lui-même l’assassin de ses propres mains, plutôt que de le laisser échapper.

Ils arrivèrent cependant à la demeure du magistrat, sans encombre : car l’émeute, comme nous l’avons vu, était occupée à concerter des plans plus profonds, et il frappa à la porte. Comme le bruit s’était généralement répandu que sir John avait été mis au ban par les émeutiers, sa maison avait été gardée toute la nuit par des agents de la police. L’un d’eux, sur la déclaration de M. Haredale, jugeant l’affaire assez importante pour l’introduire devant le magistrat, lui procura sur-le-champ une audience.

On ne perdit pas de temps pour délivrer un mandat d’arrêt, afin de mettre l’assassin à Newgate, bâtiment neuf qui venait d’être récemment achevé à grands frais, et que l’on considérait comme une prison d’une force respectable. Quand on eut le mandat, trois agents de police garrottèrent l’accusé de nouveau : car, dans les efforts qu’il avait faits en se débattant en voiture, il s’était dégagé de ses menottes. Ils le bâillonnèrent pour qu’il ne pût pas appeler à son secours, dans le cas où l’on aurait à traverser quelque rassemblement, et prirent place dans la chaise, à côté de lui. Ils étaient bien armés et formaient une escorte formidable : Cependant ils prirent encore la précaution de baisser les stores pour