Page:Dickens - Bleak-House, tome 2.djvu/205

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tirer de sa coquille ! On ne le voit pas, on ne l’entend pas ; il n’y a donc qu’un coup de canon qui fût capable de faire sortir ce vieillard de son calme impassible ?

Le personnage allégorique du plafond conserve également l’attitude dans laquelle il persiste ; Romain ou Breton, il n’a toujours qu’une idée en tête, il montre toujours avec la même ardeur le point qu’il désigne depuis un siècle, sans que personne pense à lui.

Cependant l’obscurité succède au clair de lune, le soleil à l’aurore ; et, quand on vient chez l’avoué pour faire son cabinet, soit qu’il y ait quelque chose de nouveau dans le geste de l’allégorie, soit que la personne qui entre devienne folle tout à coup, pour avoir levé les yeux et regardé ensuite par terre le point que désigne le Romain, elle se sauve en poussant un cri d’effroi ; d’autres personnes arrivent, regardent, crient et s’enfuient à leur tour, et l’alarme se répand dans le quartier.

Quel peut en être le motif ? Des gens habitués à ces sortes de besogne entrent dans le cabinet de l’homme de loi, dont les fenêtres restent fermées, et transportent quelque chose de pesant dans la chambre voisine. On chuchote, on s’étonne. On fouille tous les coins de l’appartement, on cherche dans tous les meubles. On suit la trace des pas ; on lève les yeux au plafond, et toutes les voix murmurent en parlant du Romain : « S’il pouvait seulement raconter ce qu’il a vu ! »

Il montre sur une table une bouteille de vin presque pleine, un verre, deux bougies qui ont été soufflées tout à coup, peu de temps après avoir été allumées, une chaise vide ; et, par terre, devant cette chaise, une tache que l’on pourrait couvrir avec la main, et qu’il montrera tant que l’humidité, la poussière et les araignées le laisseront subsister. Désormais, son geste a un but qu’il n’avait pas du vivant de M. Tulkinghorn, car le vieil avoué n’est plus ; l’allégorie a vainement désigné la main qui s’est levée contre lui et montre depuis la veille au soir l’endroit où gît le vieillard, la face contre terre, le cœur percé d’une balle.