Page:Dickens - Bleak-House, tome 2.djvu/241

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

de son manteau ; mais je suis bien tourmentée ; il est si peu raisonnable et dit tant de choses qu’il ne pense pas. Les gentlemen du jury ne le connaissent pas comme nous ; et les apparences qui l’accusent, et tous ces gens qui parleront contre lui ; ce Bucket est si habile !

— Avec son violoncelle d’occasion, et son histoire de jouer du fifre quand il était enfant, ajouta M. Bagnet d’un air grave.

— Et je vous le répète, mademoiselle ; quand je dis mademoiselle, je parle en même temps aux gentlemen, poursuivit mistress Bagnet en nous entraînant dans un coin et en dénouant son chapeau pour respirer plus à l’aise. Vous feriez valser la citadelle de Douvres avant de faire démarrer Georges de ce qu’il a résolu, à moins d’avoir plus de puissance que nous n’en avons tous ; mais heureusement que j’ai trouvé ce qu’il nous faut.

— Vous êtes un vrai trésor, dit mon tuteur.

— Voyez-vous, mademoiselle, quand il dit que sa condamnation ne déshonorerait personne, voulant nous faire croire par là qu’il n’a pas un seul parent, c’est de la blague. Sa famille ne le connaît plus, c’est vrai ; mais c’est pas une raison. Il m’en a dit plus long qu’aux autres, et ce n’était pas pour rien qu’il a parle un de ces soirs à mon Woolwich des rides et des cheveux blancs d’une mère ; je parierais cinquante livres que ce jour-là il avait vu la sienne. Elle vit donc, et il faut l’amener tout de suite. »

L’excellente femme mit immédiatement quelques épingles dans sa bouche et releva sa robe, qu’elle attacha tout autour au niveau de son manteau gris avec une rapidité surprenante.

« Lignum, dit-elle ensuite, tu prendras soin des enfants. Donne-moi le parapluie, mon vieux ; je pars pour le comté de Lincoln, et je ramènerai la mère de Georges.

— Dieu la bénisse ! s’écria mon tuteur en mettant la main à sa poche. A-t-elle seulement de l’argent ? »

Mistress Bagnet tira de son jupon un petit sac de cuir, d’où elle sortit quelques schellings qu’elle compta précipitamment et qu’elle remit dans sa bourse de l’air le plus satisfait du monde.

« Ne vous inquiétez pas de moi, dit-elle, je suis la femme d’un vieux soldat ; les voyages, ça me connaît. Lignum, mon vieux, trois pour les enfants, et un pour toi, ajouta-t-elle en embrassant le vieux soldat ; je pars, et je ne serai pas longtemps. »

Elle nous fit une révérence, s’éloigna d’un pas rapide, tourna le coin et disparut.

« Vous la laissez partir ainsi ? dit mon tuteur à M. Bagnet.

— On ne pourrait pas l’en empêcher, répondit celui-ci. Elle est revenue comme ça au pays, de l’autre bout du monde, avec