Page:Dickens - Bleak-House, tome 2.djvu/283

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larmes vous empêcheraient de veiller sur votre noble maître qui a besoin de tous vos soins. Quant à votre fils, je vous le répète, il est sorti de prison, blanc comme neige, et sans qu’on puisse parler de lui autrement qu’à sa louange, vous pouvez m’en croire ; c’est moi qui l’ai arrêté, et je vous assure qu’il s’est bravement conduit ; un homme superbe et vous une fort belle femme ; la digne mère d’un tel fils ; un couple modèle à montrer aux amateurs. Ne craignez rien, sir Leicester ; je ne m’arrêterai pas que je ne l’aie retrouvée ; soyez tranquille, je lui dirai de votre part tout ce qu’il y aura de plus affectueux ; du courage ! sir Leicester, et vous verrez que tout s’arrangera »

Le premier soin de M. Bucket est de se diriger vers l’appartement de Sa Seigneurie, pour y chercher quelque indice de la route qu’elle a pu suivre.

« Un boudoir qui a dû coûter cher ! dit-il en élevant sa bougie pour regarder autour de lui. Elle a dû avoir bien de la peine à se séparer de tout cela. Quelqu’un qui me verrait là pourrait me prendre pour un cadet du grand monde qui s’apprête à aller briller à quelque rout élégant, ajouta-t-il en fouillant dans les meubles et dans les coffrets ; je commence à me persuader que je suis un merveilleux sans le savoir, un officier des gardes peut-être. » Et cherchant toujours il découvre au fond d’un double tiroir une petite boîte dont il retire des gants d’une douceur et d’une souplesse inimaginables, sous lesquels se trouve un mouchoir de poche qui n’a rien d’extraordinaire. « Hum ! dit-il en posant la bougie ; regardons cela d’un peu plus près ; qu’avez-vous de si précieux pour qu’on vous mette à part ? Ne seriez-vous pas un souvenir ? vous avez bien une marque, je suppose ? » et M. Bucket lit tout haut le nom d’Esther Summerson.

« Très-bien, se répond-il après avoir porté son index à l’oreille ; je vous emporte avec moi. » Et remettant chaque chose à sa place. M. Bucket se glisse dans la rue, choisit parmi les voitures de la station la plus rapprochée celle qui a le meilleur attelage, et se fait conduire à la galerie de M. Georges.

Il ne s’est pas trompé sur l’ardeur des chevaux qui l’entraînent et brûlent le pavé, ce qui ne l’empêche pas de jeter un regard pénétrant sur toutes les femmes, sur toutes les fenêtres, sur le ciel noir, sur la terre revêtue de neige, car il peut à la rigueur y découvrir quelque chose qui l’assiste dans son entreprise. Il descend de voiture enveloppé d’un nuage de vapeur qui s’exhale de ses coursiers fumants.

« Débridez-les une minute pour qu’ils soufflent à leur aise ; je reviens dans un instant, dit-il au cocher.