Page:Dickens - Bleak-House, tome 2.djvu/349

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

lice était certainement la dernière personne qu’il eût prise pour confident s’il avait pu s’en dispenser.

« Une fois mêlé à cette affaire, que nous examinâmes ensemble et qui nous fit passer des moments fort agréables, je vous confirmai dans vos craintes et ne vous cachai pas que vous feriez infiniment mieux, dans votre intérêt, de ne pas conserver ce testament entre vos mains ; d’où il fut convenu que vous le remettriez à M. Jarndyce, que voici ; et cela sans aucune condition, vous fiant à sa générosité s’il arrivait que ce testament fût valable. Ne sont-ce pas là nos conventions ?

— Oui, monsieur, répondit le vieillard toujours de fort mauvaise grâce.

— Par suite desquelles, reprit M. Bucket en changeant tout à coup de manière et de langage, vous avez pris sur vous ledit testament qui se trouve à cette heure dans votre poche ; et la seule chose qui vous reste à faire est de l’en tirer immédiatement. »

M. Bucket, après nous avoir lancé un regard du coin de l’œil et s’être frotté le nez triomphalement avec son index, riva ses yeux sur le vieillard et tendit la main pour prendre le testament et le présenter à mon tuteur. Ce ne fut pas sans beaucoup de répugnance que M. Smallweed consentit à exhiber la pièce qui lui était demandée, et sans avoir déclaré à plusieurs reprises qu’il n’était qu’un pauvre homme, obligé de vivre de sa petite industrie, et qu’il s’en rapportait à l’honneur de M. Jarndyce qui ne voudrait pas abuser de sa probité pour lui faire perdre ce qui lui était dû. Peu à peu il tira lentement d’un portefeuille qu’il avait sur la poitrine un papier jauni et taché, roussi à l’extérieur et brûlé sur les bords, comme si jadis on l’avait jeté au feu et retiré subitement des flammes. M. Bucket, avec la dextérité d’un prestidigitateur, fit passer en un clin d’œil le précieux papier des mains de M. Smallweed dans celles de M. Jarndyce, et dit tout bas à ce dernier, en le lui remettant :

« Ils ne se sont pas entendus sur le chiffre qu’ils voulaient en avoir ; ils se sont même querellés : j’ai offert cinq cents francs pour en finir. Là-dessus le petit-fils, qui n’est pas moins avare que son grand-père, a reproché à celui-ci de vivre trop longtemps ; vous jugez du tapage ! Ils se vendraient tous dans la famille réciproquement, pour une couple d’écus, excepté la grand’mère ; et cela parce qu’ayant perdu la tête, elle a l’esprit trop faible pour conclure un marché.

— Quelle que soit la teneur de ce papier, monsieur Bucket, répondit M. Jarndyce, je vous suis infiniment obligé de la dé-