Page:Dickens - Bleak-House, tome 2.djvu/378

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puis ses bras se détendirent peu à peu. Elle nous regarda, leva les yeux vers le ciel, et ses lèvres s’agitèrent.

« Quand j’irai à Bleak-House, reprit Richard, j’aurai beaucoup à vous dire ; et vous, monsieur, vous aurez beaucoup de choses à me montrer ; vous viendrez, n’est-ce pas ?

— Sans doute, mon cher ami, sans doute.

— Merci, dit Richard, toujours le même, toujours ! Ils m’ont dit comment vous aviez arrangé tout cela ; poussant la bonté jusqu’à vous ressouvenir des moindres habitudes, des moindres goûts d’Esther. Je croirai revenir à l’ancien Bleak-House.

— Vous y reviendrez aussi, je l’espère bien, Rick. Je vais y être tout seul, et ce sera une charité que de venir me voir, ajouta-t-il en passant la main sur les cheveux blonds d’Éva et en portant à ses lèvres une de leurs mèches soyeuses. Il me sembla deviner en ce moment qu’il se faisait à lui-même la promesse de lui servir d’appui.

— Ce fut un bien mauvais rêve ! s’écria Richard en serrant tout à coup les deux mains de mon tuteur.

— Rien de plus, mon pauvre Rick.

— Et vous seriez assez bon pour avoir pitié du rêveur, pour lui pardonner quand il s’éveille, et pour l’encourager ?

— Moi-même n’ai-je pas rêvé ? répondit mon tuteur en lui serrant la main.

— Je vais commencer une nouvelle existence, » dit Richard, dont les yeux rayonnèrent.

Allan se rapprocha d’Éva et fit un geste solennel pour avertir mon tuteur.

« Quand partirai-je de cet endroit obscur ? poursuivit Richard ; quand partirai-je pour retourner où nous étions autrefois, pour revoir cette campagne où je retrouverai la force de dire tout ce qu’Éva fut pour moi, où je reconnaîtrai mon aveuglement et mes fautes, et où je me préparerai à devenir le guide et le soutien de mon enfant qui va naître ? Quand partirai-je ?

— Dès que vous le pourrez, mon cher ami, répondit mon tuteur.

— Éva, mon ange ! »

Il essaya de se soulever un peu. Allan le prit et le plaça de manière qu’il pût la serrer sur son cœur ; c’était ce qu’il désirait.

« J’ai eu bien des torts envers toi, ma bien-aimée, lui dit-il ; j’ai répandu l’ombre sur ta route, qui aurait dû être si belle ; en t’épousant, je t’ai unie à l’inquiétude et à la pauvreté ; j’ai pris ton avoir et l’ai dispersé à tous les vents ; me pardonnes-tu, mon