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Page:Dickens - Bleak-House, tome premier.pdf/233

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— Il résulte de tout cela, répondit mon tuteur d’un air enjoué, que celui qui a répondu pour les meubles devra les payer.

— Certainement, reprit M. Skimpole, et c’est là ce qui achève le ridicule de mon propriétaire ; vous n’ignorez pas, lui ai-je dit, que c’est mon excellent ami Jarndyce qui devra payer tout ce que vous enlevez d’une façon aussi indélicate ; n’avez-vous donc nul respect pour le droit de propriété de cet excellent ami ?

— Et il a refusé toutes vos propositions ? demanda M. Jarndyce.

— Toutes mes propositions, répondit M. Skimpole. Je l’ai pris à part et lui ai dit : « Vous entendez les affaires ? — Oui, monsieur. — Très-bien, ai-je répondu ; eh bien ! traitons cette affaire-là entre nous ; voici du papier, des plumes, de l’encre et des pains à cacheter ; que demandez-vous ? J’habite votre maison depuis longtemps, et, je le crois, à notre mutuelle satisfaction, jusqu’au moment où ce malentendu s’est élevé entre nous ; arrangeons cela en amis et d’après toutes les règles qu’on suit en affaires : que voulez-vous ? que demandez-vous ? » Pour toute réponse, il me dit en langage figuré, à la façon des Orientaux : « qu’il n’avait jamais vu la couleur de mon argent. — Mon aimable ami, répondis-je, c’est tout simple ; je n’en ai jamais et ne sais pas même ce que c’est. — Eh bien ! reprit-il, que m’offririez-vous si je vous donnais du temps ? — Je ne sais pas ce que vous voulez me dire avec votre temps, répondis-je encore ; mais je suis prêt à faire tout ce qui pourra se conclure entre nous avec du papier, des plumes, de l’encre et des pains à cacheter. Mais, encore une fois, ne vous payez pas aux dépens d’un autre, ce qui est une folie ; et, puisque vous connaissez les affaires, terminons celle-là entre nous. Il ne voulut pas m’entendre, et la chose en resta là. »

Si le caractère de M. Skimpole avait quelques inconvénients, il avait assurément ses avantages ; par exemple, celui de permettre à cet aimable compagnon de satisfaire un excellent appétit et de manger un panier de pêches de primeur, comme il lui arriva de le faire pendant notre voyage, sans qu’il songeât à payer quoi que ce soit. Il en fut de même, lorsque arrivés où nous quittions la voiture, on lui demanda le prix de sa place.

«  Combien faut-il pour que vous soyez largement rétribué ? demanda-t-il à son tour.

—— Un petit écu, répondit le conducteur.

— Ce n’est pas cher, » reprit-il en laissant M. Jarndyce donner ce qu’on lui demandait.