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Page:Dickens - Bleak-House, tome premier.pdf/400

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je me mis à rire, en devenant toute confuse lorsqu’elle me le demanda ; néanmoins, je lui répondis que je me mettais à sa disposition pour lui apprendre tout ce que je pouvais savoir, et je lui montrai mes livres, lui expliquai mon système, je lui donnai mes recettes, mes méthodes et tous les petits secrets de mon tatillonnage. On aurait dit qu’il s’agissait d’inventions merveilleuses, à la manière dont elle les étudiait ; et si vous aviez vu avec quel empressement elle accourait pour me suivre, dès qu’elle entendait quelque part tinter mon trousseau de clefs, vous auriez pensé que jamais plus grand imposteur que moi n’avait rencontré séide plus aveugle que Caddy Jellyby.

Si bien qu’avec notre travail et les soins du ménage, les leçons de Charley, le trictrac de mon tuteur et les duos avec Éva, le temps s’envola plus rapidement que jamais. Les trois semaines à peu près écoulées, je ramenai Caroline chez elle pour voir un peu ce que nous pourrions y faire ; Éva et Charley restèrent à Bleak-House pour soigner mon tuteur.

Quand je dis chez elle, je parle de la maison où son père et sa mère étaient logés en garni. On faisait, à l’académie de Newman-Street, certains préparatifs pour le mariage, presque tous destinés à augmenter le bien-être du vieux gentleman et quelques-uns pour établir le jeune couple au meilleur marché possible dans le grenier de la maison ; mais le grand point pour nous c’était de disposer d’une manière décente l’appartement garni de Hatton pour le déjeuner de noces, et d’inculquer à mistress Jellyby quelque notion de la solennité qui allait avoir lieu.

Entreprise difficile, car mistress Jellyby occupait, avec le jeune homme maladif qui lui servait de secrétaire, la pièce principale, située sur le devant de la maison ; cette pièce était jonchée de papiers déchirés et de documents africains, autant qu’une étable mal tenue peut l’être de litière. C’était là qu’elle restait depuis le matin jusqu’au soir, avalant du café, dictant des lettres et donnant à heure fixe des audiences relatives à Borrioboula-Gha. Le jeune secrétaire, qui paraissait décliner chaque jour, prenait ses repas au dehors. Quand M. Jellyby rentrait, il grognait un peu, et descendait à la cuisine, où il mangeait, si toutefois la servante avait quelque chose à lui donner ; après quoi, sentant bien qu’il gênait, il sortait de la maison et se promenait dans la rue au brouillard et à la pluie ; quant aux enfants, ils se traînaient jusqu’en haut de l’escalier, qu’ils dégringolaient ensuite, comme ils avaient toujours fait.

L’impossibilité de produire ces pauvres petits sous un aspect convenable, le jour de la cérémonie, étant hors de doute, je pro-