Page:Dickens - Contes de Noël, traduction Lorain, 1857.djvu/88

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nêtre à un petit garçon endimanché, qui s’était arrêté peut-être pour le regarder.

― Hein ? répondit l’enfant ébahi.

― Quel jour sommes-nous aujourd’hui, mon beau petit garçon ? dit Scrooge.

― Aujourd’hui ! repartit l’enfant ; mais c’est le jour de Noël.

― Le jour de Noël ! se dit Scrooge. Je ne l’ai donc pas manqué ! Les esprits ont tout fait en une nuit. Ils peuvent faire tout ce qu’ils veulent ; qui en doute ? certainement qu’ils le peuvent. Holà ! hé ! mon beau petit garçon !

― Holà ! répondit l’enfant.

― Connais-tu la boutique du marchand de volailles, au coin de la seconde rue ?

― Je crois bien !

― Un enfant plein d’intelligence ! dit Scrooge. Un enfant remarquable ! Sais-tu si l’on a vendu la belle dinde qui était hier en montre ? pas la petite ; la grosse ?

― Ah ! celle qui est aussi grosse que moi ?

― Quel enfant délicieux ! dit Scrooge. Il y a plaisir à causer avec lui. Oui, mon chat !

― Elle y est encore, dit l’enfant.

― Vraiment ! continua Scrooge. Eh bien, va l’acheter !

― Farceur ! s’écria l’enfant.

― Non, dit Scrooge, je parle sérieusement. Va acheter et dis qu’on me l’apporte ; je leur donnerai ici l’adresse où il faut la porter. Reviens avec le garçon et je te donnerai un schelling. Tiens ! si tu reviens avec lui en moins de cinq minutes, je te donnerai un écu. »

L’enfant partit comme un trait. Il aurait fallu que l’archer eût une main bien ferme sur la détente pour lancer sa flèche moitié seulement aussi vite.

« Je l’enverrai chez Bob Cratchit, murmura Scrooge se frottant les mains et éclatant de rire. Il ne saura pas d’où cela lui vient. Elle est deux fois grosse comme Tiny Tim. Je suis sûr que Bob goûtera la plaisanterie ; jamais Joe Miller n’en a fait une pareille. »

Il écrivit l’adresse d’une main qui n’était pas très-ferme, mais il l’écrivit pourtant, tant bien que mal, et descendit ouvrir la porte de la rue pour recevoir le commis du marchand de volailles. Comme il restait là debout à l’attendre, le marteau frappa ses regards.

« Je l’aimerai toute ma vie ! s’écria-t-il en le caressant de la main. Et moi qui, jusqu’à présent, ne le regardais jamais, je