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LES CARILLONS.

Par ici, venez dans cette ruelle, et je vous dirai pourquoi. N’allez pas chez lui. »

Sa nouvelle connaissance le regarda comme si elle l’eût cru fou ; mais elle ne laissa pas de le suivre. Lorsqu’ils furent à l’écart, Trotty lui apprit ce qu’il savait, quelle réputation on lui avait faite et le reste.

Will Fern l’écouta avec un calme qui le surprit, ne le contredisant ni l’interrompant, et hochant la tête de temps en temps, plutôt, à ce qu’il semblait, pour confirmer une vieille histoire que pour la réfuter. Seulement une fois ou deux il releva son chapeau et passa sa main calleuse sur son front dont toutes les rides retraçaient en miniature les sillons que sa charrue avait creusés : mais rien de plus.

« C’est assez vrai sur le tout, dit-il. Je pense bien avoir un peu trop parlé et contrarié ses plans. Oui, ma foi, et je le ferais encore demain. Quant à ma réputation, ces messieurs n’ont qu’à fouiller, je les défie d’y trouver une tache. Je leur souhaite de ne pas perdre aussi facilement que nous autres, pauvres gens, la bonne opinion qu’on a d’eux. Quant à moi, jamais cette main, voyez-vous, n’a rien pris qui ne fût à moi, et jamais elle n’a refusé l’ouvrage quelque dur ou mal payé qu’il pût être. À qui pourra le nier, je permets de la couper. Mais quand le travail ne me fait plus vivre comme une créature humaine, quand telle est ma nourriture, que je souffre de la faim dehors et dedans,