Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 1.djvu/108

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continua M. Mell, les lèvres tremblantes d’émotion, pour insulter un gentleman.

— Un quoi ? Qu’est-ce qu’il a dit ? cria Stoorforth. »

Ici quelqu’un, c’était Traddles, s’écria :

« Fi donc ! Steerforth ! C’est mal ! »

Mais M. Mell lui ordonna immédiatement de se taire.

« En insultant quoiqu’un qui n’est pas heureux en ce monde, monsieur, et qui ne vous a jamais fait le moindre tort ; quelqu’un dont vous n’avez ni assez d’âge ni assez de raison pour pouvoir apprécier la situation, dit M. Mell d’une voix toujours plus tremblante, vous commettez une bassesse et une lâcheté. Maintenant, monsieur, vous pouvez vous asseoir ou rester debout, comme bon vous semble. Copperfield, continuez.

— Copperfield, dit Steerforth en s’avançant au milieu de la chambre, attendez un instant. Monsieur Mell, une fois pour toutes, entendez-moi bien. Quand vous avez l’audace de m’appeler un lâche, ou de me donner quelque autre nom de ce genre, vous n’êtes qu’un impudent mendiant. Vous êtes toujours un mendiant en tout temps, vous le savez bien, mais dans le cas présent, vous êtes un impudent mendiant. »

Je ne sais ce qui se préparait. Steerforth allait peut-être sauter au collet de M. Mell, ou peut-être M. Mell allait-il commencer les coups. Mais en une seconde tous les élèves semblèrent changés en blocs de pierre ; M. Creakle était au milieu de nous, Tungby debout à côté de lui ; mistress Creakle et sa fille passaient la tête à la porte d’un air effrayé. M. Mell s’accouda sur son pupitre, la tête cachée dans ses mains, sans prononcer une seule parole.

« Monsieur Mell, dit M. Creakle, en le secouant par le bras ; et sa voix généralement si faible avait pris assez de vigueur pour que Tungby jugeât inutile de répéter ses paroles ; vous ne vous êtes pas oublié, j’espère ?

— Non, monsieur, non, répondit le répétiteur en relevant ta tête et en se frottant les mains avec une sorte d’agitation convulsive. Non, monsieur, non. Je me suis souvenu… je… Non, monsieur Creakle… je ne me suis pas oublié… je… je me suis souvenu, monsieur… je… j’aurais seulement voulu que vous vous souvinssiez un peu plus tôt de moi, monsieur Creakle. Cela aurait été plus généreux, monsieur, plus juste, monsieur. Cela m’aurait épargné quelque chose, monsieur. »

M. Creakle, les yeux toujours fixés sur M. Mell, s’appuya