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Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 1.djvu/257

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gaiement ensemble la cour de la cathédrale, sans nous attendre à rencontrer personne, nous voyions apparaître M. Jack Maldon qui était tout étonné de nous trouver là.

La mère de mistress Strong me plaisait infiniment. Elle s’appelait mistress Markleham, mais nous avions coutume, à la pension, de l’appeler le Vieux-Troupier, pour reconnaître la tactique avec laquelle elle faisait manœuvrer la nombreuse armée de parents qu’elle conduisait en campagne contre le docteur. C’était une petite femme avec des yeux perçants. Elle portait toujours, lorsqu’elle était en grande toilette, un éternel bonnet orné de fleurs artificielles et de deux papillons voltigeant au-dessus des fleurs. On disait parmi nous que ce bonnet venait assurément de France, et ne pouvait tirer son origine que de cette ingénieuse nation ; tout ce que je sais, c’est qu’il apparaissait le soir partout où mistress Markleham faisait son entrée ; qu’elle avait un panier chinois pour l’emporter dans les maisons où elle devait passer la soirée, que les papillons avaient le don de voltiger sur leurs ailes tremblotantes, aussi agiles, aussi actifs que « l’abeille diligente ! » si ce n’est qu’ils ne rapportaient au docteur Strong que des frais.

Je pus faire à mon aise des observations sur le Vieux-Troupier, soit dit sans lui manquer de respect, un soir qui me devint mémorable par un autre incident que je vais raconter. Le docteur recevait quelques personnes ce soir-là, à l’occasion du départ de M. Jack Maldon pour les Indes, où il allait entrer comme cadet dans un régiment, je crois, M.Wickfield ayant enfin terminé cette affaire. Ce jour-là se trouvait justement aussi l’anniversaire du docteur. Nous avions congé, nous lui avions fait notre cadeau le matin ; Adams avait fait un discours au nom de tous les élèves, et nous avions applaudi à nous enrouer, ce qui avait fait pleurer le bon docteur. Le soir M. Wickfield, Agnès et moi, nous allâmes prendre le thé chez lui, en particulier.

M. Jack Maldon y était déjà : mistress Strong, vêtue d’une robe blanche ornée de rubans cerise, jouait du piano au moment de notre arrivée, et il se penchait vers elle pour tourner les pages. Elle me parut un peu plus pâle qu’à l’ordinaire quand elle se retourna, mais elle était jolie, remarquablement jolie.

« J’ai oublié de vous faire mes compliments pour votre anniversaire, docteur, dit la mère de mistress Strong quand nous fûmes assis ; croyez bien, d’ailleurs, que ce ne sont pas de