Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 2.djvu/202

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

paisible intérêt et son affectueux regard trouvaient toujours un écho tout prêt dans leurs deux cœurs ; chacun d’eux savait que l’autre aimait M. Dick, et que lui, il les aimait aussi tous deux ; c’est comme cela qu’il devint ce que nul autre ne pouvait être…, un lien entre eux.

Quand je pense à lui et quo je le vois, avec sa figure intelligente, mais impénétrable, marchant en long et en large à côté du docteur, ravi de tous les mots incompréhensibles du Dictionnaire, portant pour Amie d’immenses arrosoirs, ou bien, à quatre pattes avec des gants fabuleux, pour nettoyer avec une patience d’ange de petites plantes microscopiques ; faisant comprendre délicatement à mistress Strong, dans chacune de ses actions, le désir de lui être agréable, avec une sagesse que nul philosophe n’aurait au égaler ; faisant jaillir de chaque petit trou de son arrosoir, sa sympathie, sa fidélité et son affection ; quand je me dis que, dans ces moments-là, son âme, tout entière au muet chagrin de ses amis, ne s’égara plus dans ses anciennes folies, et qu’il n’introduisit pas une fois dans le jardin l’infortuné roi Charles ; qu’il ne broncha pas un moment dans sa bonne volonté reconnaissante ; que jamais il n’oublia qu’il y avait là quelque malentendu qu’il fallait réparer, je me sens presque confus d’avoir pu croire qu’il n’avait pas toujours son bon sens, surtout en songeant au bel usage que j’ai fait de ma raison, moi qui me flatte, de ne pas l’avoir perdue.

« Personne que moi ne sait ce que vaut cet homme, Trot ! me disait fièrement ma tante, quand nous en causions. Dick se distinguera quelque jour ! »

Il faut qu’avant de finir ce chapitre je passe à un autre sujet. Tandis que le docteur avait encore ses hôtes chez lui, je remarquai que le facteur apportait tous les matins deux ou trois lettres à Uriah Heep, qui était resté à Highgate aussi longtemps que les autres, vu que c’était le moment des vacances, l’adresse était toujours de l’écriture officielle de M. Micawber, il avait adopté la ronde pour les affaires. J’avais conclu avec plaisir, de ces légers indices, que M. Micawber allait bien ; je fus donc très-surpris de recevoir un jour la lettre suivante de son aimable femme :


Canterbury, lundi soir.

« Vous serez certainement bien étonné, mon cher M. Copperfield, de recevoir cette lettre. Peut-être le serez-vous encore plus du contenu, et peut-être plus encore de la demande