Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 2.djvu/24

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Joram. Même en dormant, elle appelle Émilie. Toute la journée, ma petite Minnie l’a demandée en pleurant, et elle voulait toujours savoir si Émilie était méchante. Que voulez-vous que je lui dise, quand le dernier soir qu’Émilie a passé ici, elle a détaché un ruban de son cou et qu’elle a mis sa tête sur l’oreiller, à côté de la petite, jusqu’à ce qu’elle dormît profondément. Le ruban est à l’heure qu’il est autour du cou de ma petite Minnie. Peut-être cela ne devrait-il pas être, mais que voulez-vous que je fasse ? Émilie est bien mauvaise, mais elles s’aimaient tant ! Et puis, cette enfant n’a pas de connaissance. »

Mistress Joram était si triste que son mari sortit de sa chambre pour venir la consoler. Je les laissai ensemble, et je repris le chemin de la maison de Peggotty, plus mélancolique, s’il était possible, que je ne l’avais encore été.

Cette bonne créature (je veux parler de Peggotty), sans songer à sa fatigue, à ses inquiétudes récentes à tant de nuits sans sommeil, était restée chez son frère pour ne plus le quitter qu’au moment du départ. Il n’y avait dans la maison avec moi qu’une vieille femme, chargée du soin du ménage depuis quelques semaines, lorsque Peggotty ne pouvait pas s’en occuper. Comme je n’avais aucun besoin de ses services, je l’envoyai se coucher à sa grande satisfaction, et je m’assis devant le feu de la cuisine pour réfléchir un peu à tout ce qui venait de se passer.

Je confondais les derniers événements avec la mort de M. Barkis, et je voyais la mer qui se retirait dans le lointain ; je me rappelais le regard étrange que Cham avait jeté sur l’horizon, quand je fus tiré de mes rêveries par un coup frappé dehors. Il y avait un marteau à la porte, mais ce n’était pas un coup de marteau : c’était une main qui avait frappé, tout en bas, comme si c’était un enfant qui voulût se faire ouvrir.

Je mis plus d’empressement à courir à la porte que si c’était le coup de marteau d’un valet de pied chez un personnage de distinction ; j’ouvris, et je ne vis d’abord, à mon grand étonnement, qu’un immense parapluie qui semblait marcher tout seul. Mais je découvris bientôt sous son ombre miss Mowcher.

Je n’aurais pas été disposé à recevoir avec beaucoup de bienveillance cette petite créature, si, au moment où elle détourna son parapluie qu’elle ne pouvait venir à bout de fermer malgré les plus grands efforts, j’avais retrouvé sur sa figure cette expression folichonne qui m’avait fait une si grande impression lors de notre première et dernière entrevue. Mais, lorsqu’elle