Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 2.djvu/320

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— Seulement un instant, pendant qu’elle était évanouie, répondis-je doucement, »

Nous marchâmes un instant en silence, puis il me dit :

« Est-ce que vous la reverrez, monsieur David ?

— Cela lui serait peut-être trop pénible.

— J’y ai pensé, répondit-il; c’est probable, monsieur, c’est probable.

— Mais, Ham, lui dis-je doucement, si vous vouliez que je lui écrivisse quelque chose de votre part, dans le cas où je ne pourrais pas le lui dire ; si vous aviez quelque chose à lui communiquer par mon entremise, je regarderais cette confidence comme un dépôt sacré.

— J’en suis sûr. Vous êtes bien bon, monsieur, je vous remercie ! Je crois qu’il y a quelque chose que je voudrais lui faire dire ou lui faire écrire.

— Qu’est-ce donc ? »

Nous fîmes encore quelques pas, puis il reprit :

« Il ne s’agit pas de dire que je lui pardonne, cela n’en vaudrait pas la peine ; mais c’est que je la prie de me pardonner de lui avoir presque imposé mon affection. Souvent je me dis, monsieur, que, si elle ne m’avait pas promis de m’épouser, elle aurait eu assez de confiance en moi, en raison de notre amitié, pour venir me dire la lutte qu’elle souffrait dans son cœur, et s’adresser à mes conseils ; je l’aurais peut-être sauvée. »

Je lui serrai la main.

« Est-ce tout ?

— Il y a encore quelque chose, dit-il ; si je peux seulement vous le dire, mettre David. »

Nous marchâmes longtemps sans qu’il ouvrît la bouche ; enfin, il parla. Il ne pleurait pas ; quand il s’arrêtait aux endroits où le lecteur verra des points, il se recueillait seulement pour s’expliquer plus clairement

«  Je l’aimais trop… et sa mémoire… m’est trop chère… pour que je puisse chercher à lui faire croire que je suis heureux. Je ne pourrais être heureux… qu’en l’oubliant, et je crains bien de ne pouvoir supporter qu’on lui promette pour moi pareille chose ; mais, si vous, maître David, qui êtes si savant, si vous pouviez trouver quelque chose à lui dire pour lui faire croire que je n’ai pas trop souffert, que je l’aime toujours, et que je la plains ; si vous pouviez lui faire croire que je ne suis pas las de la vie, qu’au contraire, j’espère la voir un jour,