Vous n’aviez pas besoin, ô Steerforth, de me dira le jour où je vous vis pour la dernière fois, ce jour que je ne croyais guère celui de nos derniers adieux ; non, vous n’avez pas besoin de me dire « quand vous penserez à moi, que ce soit avec indulgence ! » Je l’avais toujours fait ; et ce n’est pas à la vue d’un tel spectacle que je pouvais changer.
On apporta une civière, on l’étendit dessus, on le couvrit d’un pavillon, on le porta dans la ville. Tous les hommes qui lui rendaient ce triste devoir l’avaient connu, Ils avaient navigué avec lui, ils l’avaient vu joyeux et hardi. Ils le transportèrent, au bruit des vagues, au bruit des cris tumultueux qu’on entendait sur leur passage, jusqu’à la chaumière où l’autre corps était déjà.
Mais, quand Ils eurent déposé la civière sur le seuil, ils se regardèrent, puis se tournèrent vers moi, en parlant à voix basse. Je compris pourquoi ils sentaient qu’on ne pouvait les placer côte à côte dans le même lieu de repos.
Nous entrâmes dans la ville, pour le porter à l’hôtel. Aussitôt que je pus recueillir mes pensées, j’envoyai chercher Joram, pour le prier de me procurer une voiture funèbre qui pût l’emporter à Londres cette nuit même. Je savais que moi seul je pouvais m’acquitter de ce soin et remplir le douloureux devoir d’annoncer à sa mère l’affreuse nouvelle, et je voulais remplir avec fidélité ce devoir pénible.
Je choisis la nuit pour mon voyage, afin d’échapper à la curiosité de toute la ville au moment du départ. Mais, bien qu’il fût près de minuit quand je partis de l’hôtel, dans ma chaise de poste, suivi par derrière de mon précieux dépôt, il y avait beaucoup de monde qui attendait. Tout le long des rues, et même à une certaine distance sur la route, je vis des groupes nombreux ; mais enfin je n’aperçus plus que la nuit sombre, la campagne paisible, et les cendres d’une amitié qui avait fait les délices de mon enfance.
Par un beau jour d’automne, à peu près vers midi, lorsque