Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 2.djvu/422

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en ce moment, il fourra, bien vite, après, sa main dans la poche de sa redingote et parut tout rassuré de l’avoir mise en lieu de sûreté.

« En vérité monsieur, dit M. Chillip après m’avoir examiné, la tête toujours penchée du même côté. Quoi ! c’est monsieur Copperfield ? Eh bien, monsieur, je crois que je vous aurais reconnu, si j’avais pris la liberté de vous regarder de plus près. Vous ressemblez beaucoup à votre pauvre père, monsieur.

— Je n’ai jamais eu le bonheur de voir mon père, lui répondis-je.

— C’est vrai, monsieur, dit M. Chillip du ton le plus doux, Et c’est un grand malheur sous tous les rapports. Nous n’ignorons pas votre renommée dans ce petit coin du monde, monsieur, ajouta M. Chillip en secouant de nouveau tout doucement sa petite tête. Vous devez avoir là, monsieur (en se tapant sur le front), une grande excitation en jeu ; je suis sûr que vous trouvez ce genre d’occupation bien fatigant, n’est-ce pas ?

— Où demeurez-vous, maintenant ? lui dis-je en m’asseyant près de lui.

— Je me suis établi à quelques milles de Bury-Saint-Edmunds, dit M. Chillip. Mistress Chillip a hérité d’une petite terre dans les environs, d’après le testament de son père ; je m’y suis installé, et j’y fais assez bien mes affaires, comme vous serez bien aise de l’apprendre. Ma fille est une grande personne, monsieur, dit M. Chillip en secouant de nouveau sa petite tête ; sa mère a été obligée de défaire deux plis de sa robe la semaine dernière. Ce que c’est ! comme le temps passe ! »

Comme le petit homme portait à ses lèvres son verre vide, en faisant cette réflexion, je lui proposai de le faire remplir et d’en demander un pour moi, afin de lui tenir compagnie.

« C’est plus que je n’ai l’habitude d’en prendre, monsieur, reprit-il avec sa lenteur accoutumée, mais je ne puis me refuser le plaisir de votre conversation. Il me semble que ce n’est qu’hier que j’ai eu l’honneur de vous soigner pendant votre rougeole. Vous vous en êtes parfaitement tiré, monsieur. »

Je le remerciai de ce compliment, et je demandai deux verres de bichof, qu’on nous apporta bientôt.