Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 2.djvu/83

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depuis ce temps-là, elle vécut toujours heureuse. » Peut-être dira-t-on cela de Betsy un de ces jours. Maintenant, Agnès, vous avez une bonne tête : vous aussi, sous quelques rapports, Trot, quoique je ne puisse pas vous faire toujours ce compliment. » Là-dessus ma tante secoua la tête avec l’énergie qui lui était propre, « Que faut-il faire ? Ma maison pourra rapporter l’un dans l’autre soixante-dix livres sterling par an. Je crois que nous pouvons compter là-dessus d’une manière positive. Eh bien ! c’est tout ce que nous avons, » dit ma tante, qui était, révérence gardée, comme certains chevaux qu’on voit s’arrêter tout court, au moment où ils ont l’air de prendre le mors aux dents.

« De plus, dit-elle, après un moment de silence, il y a Dick. Il a mille livres sterling par an, mais il va sans dire qu’il faut que ce soit réservé pour sa dépense personnelle. J’aimerais mieux le renvoyer, quoique je sache bien que je suis la seule personne qui l’apprécie, plutôt que de le garder, à la condition de ne pas dépenser son argent pour lui jusqu’au dernier sou. Comment ferons-nous, Trot et moi, pour nous tirer d’affaire avec nos ressources ? Qu’en dites-vous, Agnès ?

— Je dis, ma tante, devançant la réponse d’Agnès, qu’il faut que je fasse quelque chose.

— Vous enrôler comme soldat, n’est-ce pas ? repartit ma tante alarmée, ou entrer dans la marine ? Je ne veux pas entendre parler de cela. Vous serez procureur. Je ne veux pas de tête cassée dans la famille, avec votre permission, monsieur. »

J’allais expliquer que je ne tenais pas à introduire le premier dans la famille ce procédé simplifié de se tirer d’affaire, quand Agnès me demanda si j’avais un long bail pour mon appartement.

« Vous touchez au cœur de la question, ma chère, dit ma tante ; nous avons l’appartement sur les bras pour six mois, à moins qu’on ne pût le sous-louer, ce que je ne crois pas. Le dernier occupant est mort ici, et il mourrait bien cinq locataires sur six, rien que de demeurer sous le même toit que cette femme en nankin, avec son jupon de flanelle. J’ai un peu d’argent comptant, et je crois, comme vous, que ce qu’il y a de mieux à faire est de finir le terme ici, en louant tout près une chambre à coucher pour Dick. »

Je crus de mon devoir de dire un mot des ennuis que ma tante aurait à souffrir, en vivant dans un état constant de guerre et d’embuscades avec mistress Crupp ; mais elle répondit à cette