Page:Dickens - David Copperfield, traduction Pichot, 1851, tome 2.djvu/278

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mère. Je m’en souviendrai toute ma vie ; mais j’accède à votre proposition. »

Miss Murdstone ferma encore les yeux en s’inclinant : puis, ayant touché du bout de ses longs doigts raides le dos de ma main, elle quitta l’embrasure de la fenêtre en arrangeant les anneaux des bracelets et du collier d’acier qui ornaient ses poignets et son cou ; les mêmes bracelets et le même collier que je lui avais connus autrefois. Ils me rappelèrent les chaînes emblématiques qui décorent le frontispice de Newgate, la prison de Londres.

Tout ce que je me rappelle du reste de la soirée, c’est que j’entendis la reine de mon cœur chanter de magiques romances en français, romances dont le refrain était généralement une invitation à danser et chanter quand même, ta ra la la, ta ra la la ! Elle s’accompagnait d’une petite harpe ; dans mon délire, j’eus la sobriété de m’abstenir de toute espèce de rafraîchissements et surtout de punch. Lorsque Miss Murdstone emmena Dora comme une princesse captive, elle me sourit et me donna sa divine main. Je me regardai dans une glace et me trouvai l’air d’un idiot, d’un hébété. J’allai me coucher dans le désordre d’esprit le plus complet, et le lendemain ma-