« Est-ce un bon maître ? » demanda Mme Brown.
Robin fit signe que oui et ajouta à voix basse :
« Et une fine mouche.
— Il habite hors de la ville, n’est-ce pas, mon chéri ? dit la vieille.
— Quand il est chez lui, reprit Robin, mais pour le quart d’heure, nous ne sommes pas chez lui.
— Où donc êtes-vous ?
— À l’hôtel, tout près de chez M. Dombey. »
La jeune fille fixa ses yeux d’un air si pénétrant et si imprévu sur Robin, que le pauvre garçon, tout décontenancé, lui offrit encore un plein verre sans plus de succès que la première fois.
« M. Dombey… continua Robin, vous savez M. Dombey, nous en avons assez parlé ensemble, vous et moi, vous rappelez-vous que vous veniez me chercher pour me parler de lui ? »
La vieille femme fit un signe de tête affirmatif.
« Eh bien ! pour lors, M. Dombey est tombé de cheval, dit Robin qui se faisait arracher les paroles une à une, et mon maître est obligé d’y être plus qu’à l’ordinaire, soit avec lui, soit avec Mme Dombey, ou avec d’autres, et alors nous sommes rentrés en ville.
— Sont-ils bons amis ensemble, petit ? dit la vieille.
— Qui ? répliqua Robin.
— Lui et elle.
— Comment ? M. et Mme Dombey ? Est-ce que je puis le savoir ?
— Mais non, mon mignon ! ton maître et Mme Dombey, répliqua la vieille d’un ton câlin.
— Je ne sais pas, dit Robin regardant tout autour de lui. Je suppose. Mais que vous êtes curieuse, madame Brown ! Trop parler nuit.
— Eh bien, est-ce qu’il y a du mal à cela ? s’écria la vieille en riant et tapant des mains. Ce gaillard de Robin est devenu bien bégueule depuis qu’il fait des affaires ! Il n’y a pas de mal à ça, il me semble ?
— Non, il n’y a pas de mal à ça, je le sais bien, reprit Robin en regardant toujours d’un air craintif la boutique du layetier, celle du marchand de bouteilles et le clocher ; mais pour ce qui est de cancaner sur mon maître, ne fût-ce que pour vous dire le nombre des boutons de son habit, jamais !